Transcription de la conférence de presse ONE UN du 12 février 2020
Le Représentant de l'UNICEF en RDC, Edouard Beigbeder, était l'invité de cette conférence de presse
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Bonjour à tous, merci aux auditeurs de Radio Okapi pour leur fidélité et bienvenue dans cette nouvelle conférence de presse des Nations Unies en République démocratique du Congo.
Avec nous depuis Goma : le porte-parole militaire de la Mission, le Lieutenant-Colonel Claude Raoul Djehoungo ; et à mes côtés ici à Kinshasa, le Représentant de l’UNICEF, Edouard Beigbeder.
D’abord, je voulais vous indiquer, comme vous l’avez certainement vu, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a rencontré le Président Felix Tshisekedi, en marge du sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba. Ils ont évoqué la situation politique et sécuritaire dans le pays et la région, ainsi que le soutien de la MONUSCO en matière de gouvernance, de sécurité et de protection des civils.
La Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en République démocratique du Congo, Leila Zerrougui, a conclu hier une visite de deux jours dans les Kasaï, à Kananga et Tshikapa.
Elle était accompagnée notamment de son adjoint, le Coordonnateur résident et Coordonnateur humanitaire, David McLachlan-Karr, pour des discussions axées sur les priorités de la MONUSCO pour le renforcement de l’autorité de l’Etat et des fonctions régaliennes de l’Etat, c’est-à-dire la police, justice et administration pénitentiaire en particulier – ainsi que pour la réintégration des anciens membres de groupes armés.
La Représentante a rencontré le gouverneur du Kasaï Central, Martin Kabuya Mulamba Kabitanga, ainsi que le gouverneur du Kasaï, Dieudonné Pieme Tutokot, et elle a également rencontré des représentants de la société civile et de la communauté humanitaire. Justice, police et réconciliation sont fondamentales pour pouvoir accompagner les Kasaï sur la voie du développement.
Mme Zerougui a également visité le centre Mpokolo Wa Muyo à Kananga qui a accueilli de nombreux enfants associés à la milice des Kamwina Nsapu et travaillé à leur réunification avec leurs familles et à leur réintégration dans les communautés. C’est un centre qui est d’ailleurs soutenu par l’UNICEF.
Mme Zerrougui a souligné la nécessité de soutenir une réintégration communautaire des membres de groupes armés qui ont rendu les armes. Les communautés qui les accueillent doivent recevoir un appui, notamment des Agences, Fonds et Programmes des Nations Unies, pour garantir que les bases d’une stabilité durable sont posées. La Représentante souligne la nécessité de créer des opportunités pour la population afin de soutenir la paix et la réconciliation pérenne des communautés par le développement.
La réintégration communautaire dans les Kasaï a également été au cœur des discussions de la rencontre que la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en République démocratique du Congo, Leila Zerrougui, a eu samedi dernier avec le Président Félix Tshisekedi. Le Président et la Représentante ont aussi discuté notamment du nouveau mandat de la MONUSCO et du dialogue stratégique à engager entre la MONUSCO et le Gouvernement vers un retrait responsable et durable de la Mission.
Toujours concernant les Kasaï, le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme a participé à la présentation d’un rapport, remis la semaine dernière au gouverneur du Kasaï Central et au ministre provincial de la Justice et des Droits de l’homme, présentant les résultats des consultations populaires pour la justice, les réparations et la prévention de nouveaux conflits dans la province. Une majorité des personnes qui ont participé à ces consultations ont recommandé des procédures judiciaires efficaces pour toute personne accusée de violations graves, avant toute initiative de réconciliation, afin de servir de leçon pour l’avenir.
Le rapport est disponible sur le site https://drcongo.un.org/
Dans l’Ituri, la MONUSCO a participé au lancement hier, aux côtés des autorités de la province, du processus de dialogue entre les communautés Lendu et Alur. Ce dialogue s’est concentré sur deux problématiques en particulier : de récentes incursions d’assaillants depuis Djugu dans des communautés Alur à Mahagi, ainsi que la reprise de violences entre les communautés Walendu Watsi et Angal.
Les communautés se sont engagées à un ensemble d’activités, de consultations et de mesures de protection des civils pour la stabilisation de la zone entre les territoires de Mahagi et Djugu. De son côté, la MONUSCO s’est engagée à continuer de soutenir techniquement et logistiquement ce processus.
Enfin, je voulais vous signaler que la Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo, Leila Zerrougui, présente ses sincères condoléances à la famille d’un casque bleu tanzanien, mort hier dans un accident de la route dans le Nord-Kivu, ainsi qu’au Gouvernement de la République Unie de Tanzanie.
Porte-parole militaire de la MONUSCO [lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Mesdames et Messieurs, amis auditeurs bonjour.
Je commencerai par les informations au Quartier général de la Force, le nouveau Commandant de la Force, le Général COSTA NEVES, qui a pris service le 28 janvier 2020, n’a pas attendu de finir ses formalités administratives avant de se mettre corps et âme dans l’exécution de sa charge.
Du 4 au 5 février 2020, il s’est rendu à Beni pour s’imprégner de la situation réelle sur le terrain. Il a en outre rencontré le Major Général Fall, commandant la 3e zone de défense des FARDC à qui il a assuré sa disponibilité à collaborer franchement dans la lutte contre les groupes armés.
Les principales informations sur la situation sécuritaire par région se présentent comme suit :
Dans la province de l’Ituri, la situation sécuritaire demeure préoccupante dans les territoires de Djugu, Mahagi et au sud d’Irumu. Le repli d’ex-combattants de leur site de pré-cantonnement dénote une crise de confiance et pourrait faire le lit a une reprise des actes de violence envers les populations civiles.
Dans le territoire de Beni, la Force poursuit son soutien indéfectible aux FARDC dans leurs offensives contre les ADF. Ces derniers, acculés à l’est de Beni, se sont dispersés dans la forêt pour se retrouver dans la zone au nord-ouest de Beni où de nombreuses exactions, en guise de représailles, ont été perpétrées contre les civils. C’est ainsi que le 9 février 2020, aux environs de 22h30, une action conjointe lancée contre les ADF a permis aux FARDC d’appréhender 40 combattants des ADF près de Makeke et de les emmener à la base des FARDC à Mangina. Cette action, qui intervient en réaction au meurtre de civils à Makeke dans la même soirée du 9 février, démontre s’il en était encore besoin, la détermination et l'engagement de la MONUSCO et des FARDC à unir leurs forces contre les ADF et à assurer la protection de la population dans la région de Beni. La MONUSCO, avec les FARDC et la PNC, effectue de robustes patrouilles dans Mangina et ses environs.
La population de Beni et celle de Mangina en particulier sont invitées à aider et à apporter leur soutien en dénonçant sans délai toute activité suspecte afin que davantage d'ADF puissent être appréhendés avec succès.
Dans la même veine, hier 11 février 2020, aux environs de 20 heures, une position des FARDC a été attaquée à Mbau par les ADF. La contre-réaction d’une section de la Brigade d’intervention de la MONUSCO, qui a déployé un renfort pour soutenir les FARDC, a permis de mettre en route les assaillants.
Par ailleurs, les personnels de la MONUSCO précédemment déployés à Simuliki ont été relevés le 10 février 2020 par une compagnie FARDC qui assure désormais la sécurité et le contrôle de la localité et ses environs. Cette opération permet, entre autres, à la Force, de redéployer ses personnels dans la région de Mamove pour y assurer la protection des civils.
Dans le reste de la province du Nord-Kivu, la Force s’attelle à limiter les exactions perpétrées contre les civils. De nombreuses patrouilles de dissuasion ont été effectuées notamment dans les localités de Matanda (27 km au nord-ouest de Sake), Vishumbi, Katsiru et dans la région sud-ouest du lac Edouard dans le but de protéger les civils.
Dans la province du Sud-Kivu, la persistance des actions des groupes armés dans le territoire de Kalehe et celle des Mai-Mai qui exercent une autorité parallèle de même que la résurgence de la violence dans la région de Mikenge demeure une source de préoccupation majeure. Le Commandant de la Force est depuis hier en visite opérationnelle dans cette région pour constater de près la situation sur le terrain et préciser sa vision en ce qui concerne la protection des civils.
Enfin, il convient de mentionner la reddition de 631 éléments appartenant à divers groupes armés depuis le début de l’année 2020.
Je voudrais aussi saisir l’occasion que m’offre cette conférence de presse pour porter un démenti formel aux allégations mensongères qui circulent depuis peu sur certains réseaux sociaux et qui accusent la MONUSCO de soutenir des groupes armés, en l’occurrence les ADF. Les affabulations du genre n’ont d’autres objectifs que jeter le discrédit sur la MONUSCO afin de mieux manipuler les populations pour défendre des intérêts inavoués.
Il y a également une vidéo qui circule depuis 9 février et qui laisse entendre que les troupes de la MONUSCO quittent Mangina et délaissent la population civile alors que la situation sécuritaire reste instable dans la région. Je voudrais préciser qu’il s’agit bien entendu des troupes de la FIB [Brigade d’intervention], notamment des contingents sud-africains et tanzaniens qui sécurisaient les humanitaires à Biakato dans le cadre de la lutte contre Ebola et qui quittaient la région pour Beni. La base de déploiement temporaire (SCD) de Biakato est désormais remise aux troupes uruguayennes de la MONUSCO, Biakato étant dans le territoire de l’Ituri, leur zone de responsabilité. La FIB continue d’organiser des patrouilles conjointes avec les FARDC dans la zone de Mangina dans le cadre de la protection des civils. Voici ce qu’il en est de la situation sécuritaire dans la zone de déploiement de la Force. Merci.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Merci mon Colonel. Je voulais également vous indiquer toujours sur la situation à Beni, que le Haut-Commissariat aux Réfugiés exprime sa vive préoccupation concernant l’aggravation de la situation dans le territoire de Beni, à l’est de la République démocratique du Congo (RDC), où la violence a déjà forcé plus de 100 000 civils à fuir leur foyer ces deux derniers mois.
Les attaques menées par des groupes armés depuis décembre dernier contre un grand nombre de villes et de villages dans la chefferie de Watalinga, près de la frontière avec l’Ouganda, ont déplacé des femmes, des hommes et des enfants vers la ville de Nobili et ses environs.
Les civils, y compris les personnes déplacées en novembre et décembre, comptent parmi les cibles des groupes armés, y compris les ADF.
La majorité des personnes qui ont été forcées de fuir lors de cette toute dernière vague de violence sont désormais hébergées par les communautés d’accueil locales de la ville de Nobili ou dans des écoles et des églises surpeuplées aux alentours.
Par ailleurs, des milliers de civils vivent dans des conditions effroyables dans une centaine d’installations informelles, dormant dans des huttes fabriquées à l’aide de branchages.
La semaine dernière, le HCR a d’urgence distribué des bâches en plastique pour aider 3 000 familles déplacées.
Nous vous rappelons que plus de cinq millions de personnes sont aujourd’hui déplacées en RDC, ce qui représente la plus importante situation de déplacement interne en Afrique. Le HCR recherche 150 millions de dollars pour répondre aux besoins des réfugiés et des personnes déplacées en RDC en 2020, mais n’a reçu que quatre pour cent de ce montant à ce jour.
Enfin, juste une petite indication concernant Ebola, le comité d’urgence de l’Organisation mondiale de la santé se réunit tout à l’heure à Genève pour évaluer si l’épidémie d’Ebola en RDC continue de constituer une urgence de santé publique de portée internationale. Je vous invite donc, à suivre leur délibération.
Et sans plus tarder, je vais donner la parole à notre invité qui est le Représentant de l’UNICEF en République démocratique du Congo, Edouard Beigbeder.
Représentant de l’UNICEF en RDC [Edouard Beigbeder] : Bonjour à tous, je suis très heureux d’être parmi vous aujourd’hui, avec vous et vos auditeurs respectifs.
Aujourd’hui nous sommes le 12 février 2020, et cet après-midi au niveau du board de l’UNICEF à New York sera discuté et, j’espère approuvé, le nouveau programme de coopération entre l’UNICEF et la République démocratique du Congo.
Ce nouveau programme de coopération pour la période 2020-2024 entre l’UNICEF et la République démocratique du Congo vient en soutien aux priorités du Gouvernement. Il a été effectivement aligné avec le plan national stratégique de développement, avec les priorités du nouveau Gouvernement ainsi que différents plans de réponse humanitaire et du nouveau plan des Nations Unies sur les cinq prochaines années.
Ce programme, en tout cas sa vision, c’est que les enfants en RDC, spécialement les plus vulnérables dans les provinces les plus diminuées et dans le contexte humanitaire, auront un accès équitable de qualité et durable aux services sociaux de base.
Donc, l’UNICEF naturellement va continuer à travailler dans les six aires qui sont spéciales et importantes pour le développement des enfants : la santé, la nutrition, l’eau, l’éducation, la protection et enfin l’inclusion sociale et la résilience.
Au niveau de la santé, nous allons définitivement continuer à supporter les efforts qui ont été faits sur la vaccination.
Nous avons fait une étude dernièrement qu’on appelle « le MICS » et je vais me servir de pas mal de ses chiffres, lors de cette discussion aujourd’hui. On a vu qu’uniquement 35 % des enfants en RDC avaient reçu tous les antigènes de la vaccination de routine.
Et donc, notre but, c’est effectivement que dans les cinq prochaines années, nous puissions amener cette couverture à un minimum de 60 % voire plus, grâce à beaucoup d’interventions en termes de s’assurer que les vaccins sont disponibles au niveau du pays et que l’on puisse vacciner les enfants.
Nous avons une bonne nouvelle par rapport à ce début de programme dans le sens où la mortalité, même si elle reste élevée, a diminué en RDC. Dans les années 60, 70, un enfant sur quatre n’atteignait pas l’âge de cinq ans. Aujourd’hui, même s’il reste élevé, c’est un peu moins d’un enfant sur dix qui n’atteint pas l’âge de cinq ans.
On mesure ainsi les progrès faits mais aussi l’importance de continuer dans le domaine de la santé et particulièrement de l’immunisation et de la nutrition.
Nous avons aussi en RDC uniquement une source sur trois qui est améliorée. Et là aussi, il y a des efforts considérables au niveau de l’eau et de l’assainissement à être faits au niveau du pays.
Un autre chiffre qui participe à la mortalité infantile, c’est [que] 42 % des enfants congolais sont malnutris. Et donc, il y a de grands efforts à travailler sur la nutrition dans les années qui viennent.
Nous avons noté des progrès assez importants au niveau de l’enregistrement des naissances, nous sommes passés de 25 % des enfants enregistrés à 40 %. Mais de nouveau, cela veut dire que le verre est à moitié vide, moitié plein, et donc il faut continuer l’effort dans ce domaine-là.
Et puis, une réalité qui malheureusement sur laquelle nous devons travailler, notamment avec la société civile et le Gouvernement, sur un changement de comportement : 29 % des jeunes filles sont mariées et deviennent mères avant l’âge de 18 ans. Et on peut noter même jusqu’à 8 % des jeunes filles de moins de 15 ans sont mariées.
Et ça, c’est un réel problème avec lequel il faut réellement, dans le prochain Country programme, travailler ensemble pour essayer d’éradiquer ce problème.
On voit aussi qu’un quart des enfants travaillent ou ont des activités qu’ils ne devraient pas avoir à leur âge. Et naturellement, l’école est la réponse à cela et c’est en cela où on soutient l’engagement du Gouvernement de la gratuité scolaire qui nous parait une façon d’éliminer l’engagement des enfants dans le travail ainsi que le mariage précoce des jeunes filles congolaises.
Nous allons aussi appuyer notamment au niveau de la santé, les ministères au niveau central mais aussi au niveau décentralisé. Ce serait très important de parler du niveau décentralisé parce que nous avons naturellement une structure étatique qui travaille au niveau national mais aussi au niveau de 26 provinces sur des paquets d’intervention multisectorielles, dont j’ai parlé un petit peu auparavant, mais aussi sur la réponse aux épidémies.
L’UNICEF soutient le Gouvernement et ses partenaires notamment dans la réponse sur Ebola, sur la réponse de l’élimination du choléra, la polio ainsi que sur la rougeole qui a été une mauvaise nouvelle en 2019.
Pour ce faire, il y a des stratégies à mettre en place notamment travailler et renforcer les systèmes et les engagements communautaires. Il faut travailler vraiment au niveau des zones de santé, des groupements, des communes pour avoir le meilleur impact possible et faire le lien entre ces niveaux et les niveaux provincial et national ; s’assurer de la redevabilité sociale : que les mères peuvent connaitre où leurs enfants peuvent se faire vacciner, recevoir certains soins ou pouvoir mettre leurs enfants à l’école ou les enregistrer mais aussi pouvoir dire si jamais ce n’est pas le cas. Mais aussi comment assurer cette double redevabilité sociale et cette communication à double volets.
Enfin, il faut travailler pour pouvoir répondre, avoir des réponses rapides au niveau des urgences en utilisant un peu plus les agences nationales. Il nous semble aujourd’hui que le tissu d’acteurs nationaux s’est développé et qu’il faut le renforcer et renforcer ses capacités. Cela va aussi avec toute la discussion internationale sur comment travailler différemment avec les acteurs nationaux. C’est quelque chose sur lequel je vais insister.
Ainsi, une réponse rapide doit aussi faire un lien, une transition avec une certaine forme de stabilisation et aller vers le développement. C’est là où je pense que, dans chacune des provinces, nous allons développer avec chacun des gouverneurs un programme Nexus. Nous avons naturellement appuyé le programme Nexus dans le Kasaï, qui a été lancé par le Coordonnateur résident [des Nations Unies].
Mais nous allons aussi avoir dans chacune des provinces, des pilotes pour que chaque province puisse avoir un dialogue autour de cela et essayer d’avoir une meilleure discussion au niveau local et faire le lien avec le niveau provincial, avec comme je l’ai dit un renforcement des systèmes, en engagement communautaire, en matière de redevabilité sociale, et de coordination des partenaires au niveau local.
Je vais m’arrêter là, parce que j’ai beaucoup de choses sur lesquelles je pourrai poursuivre. Mais sachez que le 27 février, nous allons supporter le lancement par le ministère du Plan et le Coordonnateur résident, toutes les données du MICS. Donc, c’est le document que j’ai ici près de moi, qui donne tout l’état des indicateurs sociaux au niveau des 26 provinces. Donc, c’est un exercice que nous avons fait avec le ministère du Plan. Cela faisait déjà quelques années qu’on n’avait pas ce genre de données. Mais surtout, c’est la première fois que nous avons toutes ces données au niveau des 26 provinces. Donc, c’est vraiment une base très importante pour pouvoir mesurer les résultats.
Il est important que les progrès qui ont été effectués ces dernières puissent continuer et surtout être accélérés. On peut vraiment, grâce à certains programmes, faire une différence. Et c’est là où le programme sur la gratuité et l’accès pour tous les enfants à l’éducation ainsi que la couverture sanitaire universelle sont des programmes importants.
Finalement, je voulais aussi indiquer que dans ce nouveau programme de pays, nous allons avoir un nouveau regard sur les problèmes urbains au vu de l’explosion démographique, quelque part, que connait ce pays.
J’ai travaillé ici entre 95-96, et je crois qu’entre 96 et aujourd’hui, la population a doublé. A l’époque où je travaillais ici, il y avait à peu près 41 millions d’habitants et aujourd’hui, on parle de 85 [millions].
Donc, il y a une vraie urbanisation qui a lieu en ce moment et comment accompagner cette urbanisation ? Comment aussi intégrer les changements climatiques dans la façon de programmer ? Et puis, réellement prendre en compte beaucoup plus le secteur privé qui commence à fleurir au niveau du pays ? Et se concentrer aussi sur les programmations sur les adolescents et leur employabilité, c’est-à-dire qu’il faut naturellement un enfant qui est vacciné, un enfant qui étudie. Mais il faut aussi lorsqu’il devient adolescent, qu’il arrive jusqu’au marché du travail. Et comment l’accompagner, quel type de partenariat nous devons créer au niveau du pays, avec le secteur privé, la société civile, le Gouvernement, pour accompagner ces adolescents vers l’âge adulte. Merci.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Merci beaucoup. On va commencer ici à Kinshasa avec une question pour notre invité.
Question 1
Flavien Musans/ Planète TV : Monsieur le Représentant de l’UNICEF, votre soutien à Ebola au niveau de l’est du pays, vous avez identifié combien d’enfants et vous avez cadré votre soutien à quel niveau par rapport à cette maladie ?
Représentant de l’UNICEF en RDC [Edouard Beigbeder] : Au niveau de l’Ebola, l’UNICEF répond, en soutien à l’OMS qui est en première ligne, sur différents volets. Le premier volet, c’est la communication, tout ce qui est autour de la communication, des risques liés à la maladie. Ça a été très important et un des piliers de la réponse, à savoir que les gens sachent de quelle maladie il s’agit et comment s’en protéger.
Le deuxième élément sur lequel l’UNICEF a particulièrement travaillé, c’est toute la dimension psychosociale, à savoir : un membre d’une famille qui a été contaminé, cela a des effets sur les autres membres de la famille, sur les membres de la communauté, et il y a une prise en charge psychosociale de ce fait.
Il y a aussi pour les enfants, lorsque leur mère est contaminée, à un moment où on ne sait pas encore si elle est contaminée ou pas, nous avons ouvert des centres pour enfants, juste à côté des centres de traitement pour qu’ils soient proches de leur mère ou de leur père, et avec des « berceuses », qui sont elles-mêmes des survivantes et ne peuvent pas passer la maladie ; le temps de voir si l’enfant va développer la maladie ou non. S’il la développe, ils vont directement au centre qui se trouve de l’autre côté de la rue.
Donc, comme je l’ai dit, la communication, le côté psychosocial, et puis toute la partie sur la prévention des infections, notamment à travers l’eau et l’assainissement. Il y a eu un programme assez important qui a été développé là-dessus.
Donc ça, ce sont nos trois efforts particuliers sur la réponse de l’Ebola, sachant que l’OMS fait la vaccination, la surveillance et d’autres aspects de l’épidémiologie, et d’autres aspects de la réponse.
Il y a aussi un autre aspect sur lequel l’UNICEF a travaillé avec les communautés. Grâce à l’engagement communautaire, nous avions beaucoup de discussions avec les communautés qui nous disaient : « mais pourquoi vous venez uniquement pour l’Ebola ? L’Ebola a eu des répercussions sociales au niveau de nos communautés, vous nous demandez de nous laver les mains mais il n’y a pas d’eau, vous nous demandez de nous vacciner contre l’Ebola mais plus personne ne vient sur la rougeole ou sur le choléra ou sur d’autres aspects ».
Donc, nous avons développé, ou renforcé, des programmes existants pour s’assurer qu’il y ait une réponse, je dirais, qui existait auparavant, qui allait continuer et qui même allait se renforcer, pour aussi que les communautés voient que ce n’est pas uniquement l’Ebola, c’est aussi la santé, c’est aussi le fait que les enfants doivent continuer à aller à l’école.
Dans des villages où il y avait Ebola, les parents ne voulaient plus envoyer les enfants à l’école. Donc, il y a eu tout un programme autour de ça pour s’assurer de la continuité scolaire au niveau de l’Ebola. Et c’est vrai que sur cette année et demie, par exemple, il n’y a pas eu d’infections connues qui se soit passée au niveau des écoles. On a appris à tous les élèves – enfin, on ne leur a pas appris, ils savaient déjà – mais on a renforcé les messages sur l’hygiène, renforcé les messages sur comment la maladie se propage et quoi faire si jamais cela se passait.
Question 2
Justin Kabumba/ Télévision panafricaine Afrik Media (Goma) : Monsieur Mathias, j’aimerais revenir sur une question qui suscite des réactions au niveau du pays. Votre partenaire que vous soutenez depuis sept ans est aujourd’hui au centre de controverses, le festival Amani. Il y a la population qui demande que ce festival soit délocalisé au niveau de la partie Grand Nord, notamment Beni, et il y a également d’autres qui demandent l’annulation totale de cette messe culturelle. Je ne sais pas quel est votre point de vue en tant que MONUSCO, parce que c’est un grand partenaire, de taille, pour la MONUSCO.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Merci. Ecoutez, je pense que le festival Amani, c’est quelque chose qu’on soutient, notamment, je pense qu’il y a certains journalistes de Kinshasa qui ont pu s’y rendre grâce à nous, on offre un soutien logistique, mais c’est vrai que ce n’est pas notre décision de savoir où il se passe. Je pense que c’est le PNUD qui est réellement en première ligne.
Je pense que c’est un grand évènement qui a gagné les cœurs de la population de Goma donc a priori, ce festival a tout lieu de continuer à se dérouler à Goma, sans exclure d’autres activités dans d’autres régions.
Question 3
Glody Murhabazi/ 7sur7 & Univers Télévision (Goma) : Ma question c’est pour le porte-parole militaire. Vous avez parlé d’une quarantaine d’éléments ADF qui ont été capturés au courant de la semaine. Il y en a d’autres, il n’y en a plus de 500 qui ont été capturés jusque-là, alors dites-nous d’abord comment s’est passée l’opération mais également, vous faites quoi de tous ces combattants que vous capturez ?
Porte-parole militaire de la MONUSCO [Lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Merci beaucoup. C’est vrai que j’ai mentionné qu’il y a une quarantaine d’ADF qui ont été capturés. Cela fait suite en réalité à l’attaque qui a été perpétrée par ces ADF où neuf civils ont perdu la vie. La prompte réaction des FARDC et d’un bataillon de la Brigade d’intervention – je vais mentionner le bataillon du Malawi – leur prompte réaction a permis de prendre les ADF en chasse et d’en capturer une quarantaine.
Selon le protocole, les ADF qui ont été capturés ont été remis aux FARDC - selon le protocole qui suit la procédure pour les garder, les interroger, avoir les renseignements qu’il faut pour que nous puissions continuer la traque des ADF.
En ce qui concerne la Force de la MONUSCO, nous ne sommes pas autorisés à les détenir, il y a des règles qui sont assez claires en ce qui concerne la manière dont les prisonniers doivent être traités.
Donc, ce sont les FARDC qui continuent de gérer les ADF qui ont été capturés. Voilà ce que je peux vous dire.
Question 4
Nephtalie Buamutala/ RTGA : Ma question je la pose au porte-parole militaire des forces de la MONUSCO. La MONUSCO dispose d’une nouvelle stratégie pour appuyer les FARDC dans la traque de groupes armés. Maintenant, les ADF braquent leurs projecteurs à Djugu et à Mahagi. Ma question est celle de savoir : hier encore, on a tué, que fait la MONUSCO par rapport à ça ? Parce que hier encore, il y a eu des morts, le dimanche, il y en a eu six, hier encore, il y a eu quatre morts ?
Porte-parole militaire de la MONUSCO [lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : C’est vrai, merci Madame. Je dois préciser qu’actuellement, les ADF sont un peu aux abois. Avec l’offensive lancée par les FARDC, les ADF se sont dispersés et utilisent les brèches, utilisent les points de passage qui sont délaissés malheureusement, pour pouvoir s’infiltrer dans les populations, et puis massacrer les populations en guise de représailles.
Je dois dire que la MONUSCO dispose effectivement de très bons moyens. Je précise que hier déjà - j’ai mentionné dans mon texte - il y a eu une attaque d’une position des FARDC à Mbau et la prompte réaction des FARDC, soutenues par une patrouille de la MONUSCO, a permis de les mettre en déroute. Nous avons déployé effectivement des grands moyens, on a déployé des avions qui ont permis de localiser exactement la position des ADF, qui a été communiquée en temps réel aux FARDC, qui ont pris ces ADF en fuite.
Alors je voudrais vous dire que nous sommes déployés sur le terrain. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre les ADF hors d’état de nuire. Mais malheureusement, ces derniers, qui sont habitués à la forêt et qui ont des complices au sein de certaines localités, profitent de ces gaps là pour pouvoir continuer leurs exactions. Mais je vous promets que la Force fait tout ce qui est en son pouvoir pour limiter au maximum les actions de ces ADF-là sur les populations. Nous faisons de notre mieux, Madame. Merci beaucoup.
Question 5
Sylvie Benita Musoki /Journaliste Radiotélévision Lobiko (Bunia). Ma question s’adresse au porte-parole militaire. Pas plus tard que la semaine dernière, les ADF ont attaqué dans le territoire de Mambasa. Et pour le moment, certains villages sont occupés par les Mai-Mai. Que prévoit la MONUSCO pour appuyer les FARDC dans la région ? Mais avant de répondre, je voulais juste éclairer l’opinion qu’au niveau de Mahagi, il n’y a pas des ADF mais il y a plutôt des éléments de CODECO qui essayent de vandaliser la population.
Porte-parole militaire de la MONUSCO [lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Madame merci beaucoup. Comme je viens de le préciser, avec l’arrivée du nouveau commandant de la Force qui, je l’ai mentionné, ne reste pas assis dans son bureau, il est déjà sur le terrain et il exprime dans chacun de nos secteurs sa vision qui est de collaborer étroitement avec les FARDC pour mettre hors d’état de nuire, non seulement les ADF, mais tous les groupes armés.
Donc, ne craignez pas, nous sommes en collaboration avec les FARDC. Nous travaillons depuis un certain moment la main dans la main pour pouvoir mettre hors d’état de nuire les groupes armés. Eux vont courir longtemps mais ils finiront par être défaits.
Question 6
Nkiere May/ Agence congolaise de presse : Je voudrais poser une petite question au Représentant de l’UNICEF. Il y a un phénomène qui ne diminue pas dans les grandes villes de la RDC. Il s’agit du banditisme urbain, des jeunes gens appelés des Kuluna. Je me demande jusqu‘à présent que fait l’UNICEF pour appuyer le Gouvernement à enrayer ce mal parce qu’ils font beaucoup de mal aux populations, surtout à Kinshasa.
Représentant de l’|UNICEF en RDC [Edouard Beigbeder] : Merci. Tout d’abord je voulais quand même revenir sur un chiffre du MICS, c’est que 87 % des enfants, font l’expériences de différentes sortes de violences durant leur jeunesse. Donc, c’est un chiffre qui est très important : il y a des violences qui sont faites à la maison, il y a des violences qui sont faites à l’école, il y a des violences qui sont faites sur le chemin de l’école. Il y a une réelle réflexion à ce niveau-là à avoir dans les différents secteurs. Mais le point que vous soulevez est diffèrent. C’est un point très difficile, très compliqué.
D’abord en ce qui concerne les enfants, nous travaillons avec les différents ministères, notamment avec le ministère de la Justice et le ministère de l’Intérieur, afin d’avoir une meilleure politique de prise en charge des enfants en conflit avec la loi. Qu’ils soient d’ailleurs victimes ou qu’ils soient aussi sujet à une voie de fait. Tout d’abord on essaie, de voir qu’il ne faut pas mélanger les jeunes adolescents avec les adultes dans les prisons. Les prisons restent les meilleures écoles du crime.
Donc, il est important de travailler en amont, de voir quelles seraient les solutions différentes des prisons pour ces enfants. Il y a certaines politiques qui ont déjà été mises en place mais naturellement leur implémentation pose un certain problème. Il y a un accompagnement de ces enfants aussi lorsqu’ils sortent de ces centres pour s’assurer qu’ils ne puissent pas récidiver. Bref, il y a une réelle [implication de la justice], que ça soit les policiers, que ça soit les magistrats, on travaille avec le Gouvernement pour qu’ils reçoivent des formations et qu’ils puissent traiter les enfants en conflit avec la loi différemment que les adultes. Et puis, naturellement, il y a des programmes sur lequel aujourd’hui on a moins de forces mais qu’on va devoir intégrer car le programme commence maintenant pour les cinq prochaines [années] c’est tout le travail sur les enfants de rues.
Et là, c’est un réel travail qui commence d’abord pour essayer de créer une confiance entre ces jeunes et l’organisation sociale qui travaille dans les rues pour essayer d’aider, de les remettre dans certains centres et après dans certaines écoles pour qu’ils puissent réintégrer la vie. Chaque enfant qui est abandonné dans la rue peut, s’il n’y a pas de programme adéquat, peut devenir un risque pour la société. C’est très important qu’il y ait des programmes qui sont faits pour ces enfants-là : pas uniquement pour mais avec ces enfants-là.
On ne dit pas aux enfants de la rue : va à l’école demain matin, rentre chez toi. Cela ne va pas fonctionner. On connait des méthodologies qu’il faut utiliser pour les enfants de rue. Cela prend du temps mais surtout il faut avoir de bonnes méthodologies qui sont implémentées.
Donc, c’est un sujet sur lequel on va revenir pendant toute la durée de l’implémentation du programme. Que ça soit avec le Gouvernement, que ça soit aussi avec la société civile- il y a quelques organisations qui sont spécialisées là-dessus et qui font un travail admirable. Et donc, il faut les soutenir pour essayer de trouver des solutions individuelles à chaque enfant [afin] qu’il puisse réintégrer au fur et à mesure la société.
Question 7
Blaise Pascal Makandi/ Essentiel Groupe (Bukavu) : Ma question s’adresse au porte-parole militaire de la MONUSCO. Je voudrais savoir au regard du tableau que vous-mêmes vous n’avez peint par rapport à la situation à Beni mais aussi de toute la présentation faite par différents collègues, confrères et consœurs et aussi par la société civile au niveau de Beni. Ma question est celle de savoir, s’il arrive des fois à la MONUSCO parfois de pouvoir s’auto apprécier par rapport à son intervention au niveau de Beni, est-ce qu’il vous arrive de vous apprécier vous-mêmes par rapport à votre intervention ? Et si la MONUSCO était un élève, quelle serait la cotation que vous vous seriez attribué sur 10 ? Par rapport à votre intervention.
Porte-parole militaire de la MONUSCO [lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Je vous remercie beaucoup monsieur. En réalité, on dit que tant qu’il reste à faire, c’est comme si rien n’était fait. Je vais simplement vous retourner la question et demander si la MONUSCO n’intervenait pas, ne soutenait pas les FARDC, quelle serait la situation ? C’est de ça qu’il s’agit. Il ne s’agit pas pour moi de peindre la situation en noir. La MONUSCO est de jour comme de nuit sur le terrain aux côtés des forces de défense et de sécurité de la République démocratique du Congo pour que les souffrances des populations cessent. Ce qui importe ici, c’est de faire en sorte que les populations cessent de souffrir, cessent d’être victimes.
Lorsque nous allons nous mettre dans les polémiques du genre comment est-ce que vous vous appréciez ? Est-ce que vous vous auto appréciez, les populations vont continuer de souffrir. Il s’agit pour nous d’avoir le soutien de tout le monde. Quand je dis tout le monde, c’est vraiment tous les acteurs pour que les souffrances des populations cessent. Monsieur, c’est ce que je peux vous dire.
Question 8
Albert Omba/ Numerica TV : Monsieur le porte-parole militaire, je crois qu’avec l’intervention de ma collègue de Bunia et de l’autre sur place ici, les ADF ont changé des positions. De l’est ils sont maintenant à l’ouest et c’est la partie forestière qui prend l’axe Mangina jusqu’à Mambasa. Est-ce qu’il y a des dispositions particulières que vous allez prendre avec les FARDC pour contrer ces ADF qui sont maintenant dans une zone forestière et vaste.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Je voudrais juste vous indiquer, Monsieur, que nous avons formé près de 500 FARDC à la technique des combats en jungle par la Force militaire, par les Brésiliens. Donc c’est quelque chose effectivement qu’on essaie de pousser au niveau de capacités des FARDC.
Porte-parole militaire de la MONUSCO [lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Effectivement, comme vous l’avez mentionné, les unités des FARDC ont été formées aux combats en zone de forêts. Et dernièrement, je crois c’était le 4 février, le commandant de la Force était à Paida, à l’Etat-major des FARDC dans la zone de Beni. Et actuellement, puisqu’effectivement les ADF ont changé des positions, il y a une planification qui est en cours et une planification conjointe, je vais le dire, pour pouvoir prendre ces ADF en chasse. Voilà ce que je peux vous dire.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Merci beaucoup à tous. Nous rendons l’antenne à radio Okapi. Bonne journée à tous.