Transcription de la conférence de presse ONE UN du 11 mars 2020
La Représentante d'ONU Femmes en RDC, Awa Ndiaye Seck, était l'invitée de la conférence de presse
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Bonjour à tous, merci aux auditeurs de Radio Okapi et bienvenue dans cette nouvelle conférence de presse des Nations Unies en République démocratique du Congo.
Aujourd’hui, nous sommes exceptionnellement connectés avec Beni, c’est là que se trouve le porte-parole militaire de la Mission, le Lieutenant-Colonel Claude Raoul Djehoungo ; et nous sommes également connectés avec Goma, Bukavu et Bunia. A mes côtés ici à Kinshasa, la Représentante d’ONU Femmes, Awa Ndiaye Seck, à l’occasion du Mois de la Femme.
D’abord, je voudrais juste vous donner rapidement des informations sur la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en République démocratique du Congo, Leila Zerrougui, qui est de retour en République démocratique du Congo.
Ce retour a eu lieu plus tôt que prévu, les évènements auxquels elle devait participer aux Etats-Unis, puis en Allemagne, ayant été reportés en raison de l’épidémie de Coronavirus.
Néanmoins, à New York, elle a pu rencontrer des partenaires de la RDC, notamment des membres du Conseil de sécurité, membres permanents et membres non permanents, ainsi que des représentants des pays qui fournissent des contingents à la MONUSCO.
Concernant l’Ituri, après la signature le 28 février dernier à Gety de l’Accord de paix entre le Gouvernement de la RDC et l’ex-groupe armé FRPI (Force de Résistance Patriotique de l’Ituri), la MONUSCO a engagé la suite du processus de démobilisation et de désarmement. Ainsi, des travaux de nettoyage et de nivellement du site de démobilisation et de cantonnement des ex-combattants à Kazana sont en cours depuis le 6 mars 2020.
Par ailleurs, le plan opérationnel pour le processus du DDR de la FRPI est terminé, il sera soumis au ministère de la Défense pour approbation et signature. Du matériel et des équipements logistiques sont déjà en route de Goma à Bunia.
Un calme relatif règne dans le territoire d’Irumu depuis la signature de l’Accord. Samedi 7 mars, une marche pour la paix a été organisée à Walendu-Bindi regroupant pour la première fois les épouses des miliciens FRPI, celles des militaires FARDC et des habitantes : un signe de réconciliation et d’engagement commun à soutenir le processus de paix après 20 ans de guerre.
Je voulais également vous signaler que 200 policiers des Nations Unies dont 84 femmes, 40 militaires et 10 civils de la MONUSCO, armés de pelles, de râteaux, de balais, de gants et de bottes, ont participé, le samedi 7 mars 2020, au nettoyage et à l’assainissement des bases principales du centre-ville de Kinshasa, notamment autour des bases de la MONUSCO.
Porte-parole militaire de la MONUSCO [Lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Mathias bonjour, Mesdames, Messieurs bonjour. Je voudrais remercier particulièrement les journalistes de Beni qui ont répondu présent à notre appel.
En ce qui concerne la situation militaire, le Général Costa Neves a poursuivi son inspection opérationnelle dans la zone de déploiement de la Force. Il était hier à Sake, dans le nord du Kivu, avec les Forces spéciales guatémaltèques et à Goma avec le bataillon uruguayen dont les personnels ont désormais en charge la sécurisation de la localité de Biakato, dans l’Ituri.
Dans le cadre de la protection des civils dans la zone de responsabilité de la Force de la MONUSCO, plus de 1 794 activités (des patrouilles diurnes et nocturnes, des patrouilles et missions de longue portée, des patrouilles de domination de la zone héliportée, patrouilles conjointes, des escortes, démonstration de force et reconnaissance aérienne) ont été menées par la Force la semaine dernière.
En outre, la Force a travaillé en étroite collaboration avec d'autres organismes, tels que la section Protection des civils et la section Protection de l'enfant, lors de multiples sessions de planification et conférences de coordination. La Force poursuivra cette coopération entre toutes les parties prenantes afin de garantir le succès de sa mission.
Les principales informations sur la situation sécuritaire par région se présentent comme suit :
Dans la province de l’Ituri, la situation demeure préoccupante avec les incidents survenus dans la région de Djugu. Afin de juguler la recrudescence de la violence, la Force de la MONUSCO a déployé des patrouilles et des missions de longue portée, puis coordonné des opérations avec les FARDC et la PNC locales afin de maximiser la protection de la population victime des exactions perpétrées par des éléments des groupes armés. La Force a marqué davantage sa présence par le biais de patrouilles ciblées de longue durée. En outre, elle continue de soutenir le dialogue communautaire avec les principaux dirigeants locaux. La Force de la MONUSCO va continuer d’appuyer la facilitation de l'Accord de paix FRPI en commençant la construction d'un camp DDRRR. La Force facilite le processus de dialogue politique sur le territoire de Mahagi où le gouverneur et la cheffe de bureau de la MONUSCO se sont engagés avec les dirigeants Alur et Lendu. En outre, des troupes ont été déployées en patrouille de dissuasion à partir des bases de Bogoro et de Roe pour permettre les activités de récolte par les communautés.
Dans le territoire de Beni, la Force a intensifié ses patrouilles dans les zones où des informations indiquaient l’imminence d’actes de violence contre les villages et les fermes. La semaine écoulée, le nombre de patrouilles exécutées afin de prévenir les actes de violence contre les civils a été augmenté de 60 %, prolongeant ainsi notre permanence sur le terrain et englobant de nouvelles zones. Cela a permis de réduire le nombre d'incidents.
À Mutwanga par exemple, des informations ont indiqué la possibilité d'une attaque imminente des ADF contre le village. Bien que des sentiments anti-MONUSCO existaient dans la localité, des troupes ont été envoyées pour assurer la protection des civils. Malgré l’hostilité affichée de façon ostentatoire par de petits groupes de ce village, nos soldats ont agi de manière ferme, afin d’empêcher que des groupes armés n’infiltrent le village pour nuire aux populations. Enfin, les vecteurs aériens ont été largement utilisés pour recueillir des informations qui ont permis non seulement à la Brigade d’intervention de la Force (FIB) de déployer ses troupes en temps opportun, mais aussi aux FARDC de fournir des renseignements précis à l'appui des opérations offensives contre les ADF. La formation aux techniques du combat dans la jungle des troupes de la FIB se poursuit également avec notamment le bataillon tanzanien et l’unité des Forces spéciales tanzaniennes.
Dans le reste de la province du Nord-Kivu, des incidents marqués par de multiples affrontements entre groupes armés et des violations des droits de l'homme ont été enregistrés. Les territoires de Masisi et Rutshuru ont été les théâtres d’affrontements entre le NDC-R et Nyatura/ APCLS/ FDLR. La Force a marqué sa présence par des patrouilles pédestres, motorisées et héliportées.
Des missions de longue durée ont été déployées dans les localités Karuba, Bweremana, Osso Farm et Matanda en territoire Masisi. Dans le territoire de Rutshuru, une base de déploiement a été installée à Vithshumbi pour pallier les problèmes d’insécurité et renforcer la confiance des habitants. Ce déploiement a en outre permis de réduire les enlèvements de personnes et prises d’otages. La base de déploiement de Kamanyola a, en liaison avec les FARDC, exécuté des patrouilles dans les plaines de Ruzizi limitrophes avec le Burundi et Rwanda.
Dans la province du Sud-Kivu, de nombreuses patrouilles ont été effectuées ainsi que des escortes au profit de personnes déplacées internes en quête de nourriture et du bois de chauffage. La Force a également apporté un soutien logistique déterminant aux FARDC dans leurs opérations contre les groupes armés. Ceci a permis de conserver la dynamique des opérations et de tenir le terrain. En outre, nos troupes sont intervenues promptement en vue de protéger les déplacés internes et prévenir les affrontements dans les régions de Minembwe et Bijombo.
Sur le plan des activités civilo-militaires, les travaux de réhabilitation de segments de route se poursuivent au grand bonheur des populations mais aussi et surtout au profit des forces de défense et de sécurité dont les déplacements pour convoyer le soutien logistique vers les lignes de combat s’en trouvent facilités. Les tronçons de routes entre Bogoro-Kasenyie, Aveba-Boga, Mbau-Semuliki et les routes de Kaniola et Kanvivira en sont une parfaite illustration. Merci Mathias. Voilà ce que je peux vous dire sur la situation sécuritaire dan les zones de déploiement de la Force.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Merci beaucoup Lieutenant-colonel. Quelques nouvelles de l’équipe de pays et on passe à notre invitée.
Alors que le ministre de la Santé publique de la République démocratique du Congo (RDC), le Dr Eteni Longondo, a notifié le premier cas de COVID-19 dans le pays, l’Organisation mondiale de la santé souligne que des efforts de préparation mis en place pendant la 10ème épidémie de la maladie à virus Ebola peuvent aider le pays.
L'OMS a déjà fourni un appui technique en termes d’équipements et matériels, notamment des kits de tests de laboratoire fournis à l'INRB et à d'autres laboratoires nationaux ainsi qu'un renforcement des capacités des équipes d’intervention rapide. L'OMS appuie également la RDC dans la surveillance, le suivi des voyageurs en provenance des pays en épidémie et le renforcement de la détection des cas suspects aux principaux points d’entrée du pays.
Vous le savez, il y a encore beaucoup à apprendre sur le COVID-19, mais les populations peuvent observer des mesures individuelles et collectives simples et quotidiennes pour prévenir la maladie. Il s'agit entre autres de : se laver les mains régulièrement avec de l'eau et du savon ; tousser dans un mouchoir ou dans le pli du coude, en veillant à jeter le mouchoir en toute sécurité dans une poubelle refermée par la suite ; maintenir une distance sociale d'au moins un mètre, en particulier si cette personne tousse ; éviter de toucher les yeux, le nez et la bouche ; et consulter un médecin le plus tôt possible si une personne développe de la fièvre ou de la toux.
Je voulais vous signaler également que l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, et ses partenaires ont lancé leur Plan régional 2020-2021 pour un montant de 621 millions de dollars, en soutien aux réfugiés de la République démocratique du Congo (RDC) dans les pays voisins.
Vous le savez, c’est l'Ouganda accueille actuellement la majorité des réfugiés congolais, soit près de 400 000 personnes. D'autres se trouvent au Burundi, au Rwanda et en Tanzanie, en Zambie, en Angola et au Congo.
Par ailleurs, la RDC continue même d'accueillir plus de 500 000 réfugiés du Burundi, de la République centrafricaine, du Rwanda et du Soudan du Sud.
Le Plan régional 2019, donc celui qui précède celui que je viens de mentionner, n'a été financé qu'à hauteur de 22 %. Donc, le HCR souligne qu’il faut des ressources disponibles suffisantes pour répondre aux besoins de tous ces réfugiés.
Sur ce, je donne la parole à notre invitée, Représentante d’ONU Femmes Awa Ndiaye Seck.
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Dimanche dernier, nous avons fêté le 8 mars, qui est la Journée internationale des femmes. Les droits des femmes et l’égalité des sexes concernent tout le pays, les femmes ET les hommes. C’est pourquoi le Premier Ministre a participé au lancement de la Journée et également au lancement du mois de la femme en RDC.
Durant tout le mois de mars, de nombreuses manifestations internationales, nationales et provinciales demandent le respect et l’égalité des sexes. Je salue et j’encourage particulièrement tous les organisateurs de manifestations dans les provinces, parce qu’ils font un travail considérable pour promouvoir l’égalité des sexes.
2020 est une année majeure pour les droits des femmes et l’égalité des sexes, en RDC et dans le monde. Ainsi, la Directrice Exécutive de l’ONU Femmes a déclaré 2020 « Année de la Génération Égalité ». 2020, c’est également l’année où nous célébrons le 25e anniversaire de la Déclaration de Beijing.
Cette campagne vise à exiger la parité salariale, le partage égal du travail domestique, la fin du harcèlement sexuel et de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, des services de santé adaptés et de qualité, ainsi que leur participation égale à la vie politique et à la prise de décisions dans tous les domaines de la vie.
Vous avez probablement déjà vu, sur les médias sociaux, les photos des personnalités qui s’engagent pour la parité en mimant le signe « égal » avec les bras. Je vous encourage, vous-mêmes à faire une photo et diffuser le message de la campagne.
En RDC, des avancées significatives ont été réalisées pour les droits et l’autonomisation des femmes ces dernières années, notamment : la représentation des femmes s’est améliorée ; la gratuité de l’enseignement primaire décrétée par le Président et qui ouvre évidemment des perspectives pour les filles; les associations féminines et la société civile qui sont très actives et s’organisent de mieux en mieux : par exemple, les femmes rurales viennent de lancer leur réseau national, le RENAFER, avec l’appui de l’ONU Femmes et de la Fédération des entreprises du Congo. C’est la première fois qu’un tel réseau est mis en place en RDC.
Mais, comme vous le savez, il reste de nombreux défis pour les Congolaises. Pour n’en citer que 3 : les femmes et les filles sont toujours les premières victimes des conflits ; les femmes sont régulièrement discriminées, notamment celles qui vivent avec le VIH/Sida ; les femmes ont peu accès à l’information sur leurs droits fondamentaux, notamment dans leur langue.
Vous, les journalistes, avez un rôle significatif à jouer pour vulgariser et promouvoir les droits des femmes auprès de votre public.
Nous vous encourageons donc à faire passer ce message : « Les femmes et les filles ont les mêmes capacités et les mêmes droits que les hommes et les garçons, dans tous les domaines ».
Nous vous encourageons aussi à diffuser des images respectueuses des femmes et des exemples de masculinité positive. Nous comptons sur vous !
Enfin, je voudrais insister sur le fait que le respect des droits des femmes et la promotion de l’égalité des sexes sont l’affaire de tous et cela se passe toute l’année, tous les jours. Nous avons tous, femmes et hommes, à gagner d’une société congolaise plus égalitaire.
Je vous remercie et je suis prête à répondre à vos questions.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : On va commencer d’ailleurs avec une question pour notre invitée.
Question 1
Flavien Musans/ Planète TV : Madame la Représentante d’ONU Femmes, je reviens sur les femmes qui vivent dans les milieux ruraux, est-ce que vous êtes sûre et certaine qu’elles commencent maintenant à comprendre ce que signifie le 8 mars et pourquoi vous célébrez ce mois-là ? Les femmes, rien que celles qui vivent dans ces milieux-là.
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Ecoutez, nous recevons des images et nous recevons des informations d’un peu partout dans le pays. Et c’est vrai que c’est toujours difficile de pouvoir dire que tout le pays est couvert. Mais je sais qu’il y a une nette amélioration dans les efforts de compréhension non seulement du 8 mars mais aussi de toutes les autres opportunités qu’il y a pour les femmes dans le cadre normatif qui existe en RDC et ailleurs.
Et je voudrais ajouter aussi qu’il y a de plus en plus d’organisations des Congolais et des Congolaises qui s’investissent dans ce cadre pour être sûr que les messages passent mieux. Et donc, nous avons l’espoir que cette année, ça s’est amélioré par rapport à l’année dernière et que l’année prochaine, ça sera encore mieux par rapport à cette année.
Question 2
Sekombi Katondolo/ Radio Okapi (Beni) : J’ai une question à la Représentante d’ONU Femmes. Comment pensez-vous que les femmes de Beni vont s’associer à cette grande journée [mois] de célébrer la femme ou les droits de la femme alors qu’elles sont déplacées, elles ne vivent pas dans leurs maisons ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Nous sommes très sensibles à la situation des femmes de Beni et nous suivons de manière très rapprochée ce qui se passe à Beni. Et je dois dire qu’ONU Femmes travaille avec des associations des femmes. Et récemment, nous avons eu le réseau des femmes leaders d’Afrique, section de la RDC qui s’appelle AWLN, African Women Leaders Network, qui a organisé une mission de solidarité à Beni et qui a passé trois jours à Beni pour justement discuter avec les femmes de Beni, échanger avec elles, recueillir de manière directe des informations de ces femmes et revenir ici, à Kinshasa pour partager ces informations. Donc, ceci nous permet, nous aussi, de voir comment mieux calibrer l’appui que nous allons donner.
Et donc, ces femmes de Beni sont dans nos têtes et ces femmes de Beni ont déjà fait passer leur message et nous sommes sensibles à ce message. Et, je pense que dans les prochaines semaines, je ne peux rien dire de manière officielle, mais dans les prochaines semaines, il y aura un suivi justement de cette mission de solidarité qui a été organisée au niveau de Beni.
Et je suis sûre qu’il y a des femmes et des hommes de Beni qui m’entendent et qui savent de quelle mission de solidarité je parle.
Question 3
Jonathan Kataliko/ RTR Beni : Je voudrais poser ma question au colonel [porte-parole militaire]. Il a parlé de la situation de Mutwanga, dans le secteur de Ruwenzori. Je coudrais savoir pourquoi les contingents de la MONUSCO font face à la résistance populaire au niveau de Mutwanga, et comment la MONUSCO compte tisser ses liens ou bien ses relations avec la population locale qu’elle compte sécuriser ?
Porte-parole militaire de la MONUSCO [Lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : Merci beaucoup. C’est vrai, nous avons eu des rumeurs que des groupes armés étaient en déplacement pour venir dans la [zone] de Mutwanga. Dans le même temps, les populations ne sont pas vraiment disposées à accueillir la Force de la MONUSCO dans la zone. Je crois qu’il y a plutôt un travail de sensibilisation à faire à la base : expliquer le rôle de la MONUSCO, le rôle de nos forces et dire pourquoi est-ce que nous sommes là. C’est dire que nous sommes là pour protéger les populations civiles. C’est ce travail qu’il faut faire d’abord en amont pour instaurer un climat de confiance entre ces populations et la Force de la MONUSCO. Voila ce que je peux vous dire.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : J’ajouterais, si je peux me permettre, que nous avons des agents de liaison communautaire entre les contingents et la population. Donc, c’est un effort aussi pour faire ce que le porte-parole militaire vient de décrire, pour bien expliquer notre mandat et parfois aussi les limites de notre mandat. Et j’ajouterais aussi qu’il y a des activités de sensibilisation qui sont faites par la composante civile de manière régulière.
Il y a eu récemment, je pense il y a quelques jours, si ce n’est hier, une réunion de sensibilisation communautaire avec la société civile à Mayimoya.
Donc, il y a des efforts qui sont faits mais c’est vrai que ça demeure un défi de gagner la confiance des populations. C’est un travail dans lequel on est engagé, à la fois au niveau de la coordination civilo-militaire, et à la fois avec nos sections civiles.
Question 4
Mimiche Lutete/ Canal Congo TV : J’ai une question pour Mme Awa. Madame, pour défendre ses droits, il faut les connaître. Est-ce que cous pensez que la femme qui est au fin fond de Katakokombe-là [dans le Sankuru] connaît ses droits ? est-ce qu’elle peut vraiment bien les défendre ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : C’est clair que la vulgarisation des droits des femmes est un défi pour tout le monde. Mais, je voudrais vous rassurer pour dire qu’il y a énormément d’initiatives qui sont prises pour effectivement faire passer les messages. ONU Femmes a travaillé avec des partenaires, notamment la coopération canadienne, la coopération suisse pour développer des outils, des vidéos en langues nationales. Et ces vidéos contiennent, sous une forme théâtrale, reproduisent le contenu de certains droits de la femme. Et ces droits-là sont présentés sous une forme ludique mais dans une langue qui est accessible. Par exemple, nous avons cette vidéo sur « Bongo te Tika », qui est diffusée et qui touche différents aspects des droits des femmes et elle est produite en quatre langues nationales, plus le français et l’anglais. Et donc, son utilisation, qui est toujours suivie d’une phase de questions-réponses, aide à faire passer les messages. Et il n’y a pas que ça, nous avons souvent des entretiens et des séances avec vous, les journalistes, pour justement aider la femme pour encore aller plus loin dans cette vulgarisation.
Question 5
Séraphin Nkiere May/ Agence Congolaise de Presse : Mme Seck, entre les années antérieures et cette année 2020, est-ce qu’il y a une évolution concernant la défense des droits des femmes, la solidarité et les autres choses, est-ce qu’il y a une évolution par rapport aux années antérieures ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Il y a une évolution et je donnerai juste deux exemples. Le premier exemple, c’est que vous avez vu une très forte mobilisation qui s’est passée il y a quelques mois. On ne sait pas si c’était réel ou non, mais il y avait eu une communication qui passait faisant penser que la présidente de l’Assemblée nationale était menacée.
Et sans que qui que ce soit ne soit à l’origine, il y a une très forte mobilisation des femmes à tous les niveaux qui ont vraiment exprimé leur point de vue pour aller défendre une femme qui, pour elles, représentait un symbole dans le cadre de la lutte pour les droits des femmes.
Et nous, nous avions été particulièrement impressionnés par cet élan unitaire des femmes, mais un élan qui s’est fait de manière presque automatique.
Le deuxième exemple, je l’ai évoqué dans mon discours, c’est que la RDC a mis en place cette année, pour la première fois dans son histoire, le réseau national des associations des femmes rurales. Cela signifie que toutes les femmes qui sont dans l’agriculture, si on fait le décompte, on se retrouve à plus de 20 millions de femmes qui sont actives dans l’agriculture et qui vivent de l’agriculture. Mais elles n’ont jamais eu une plateforme nationale qui regroupe les différentes associations des femmes rurales.
Et pour la première fois cette année, juste il y a quelques semaines, je pense certains d’entre vous ont vu les images ou ont pu même assister, ce réseau a pu être mis en place, le RENAFER, le Réseau national des femmes rurales, avec l’appui de ONU Femmes et de la FEC [Fédération des entreprises du Congo].
Donc pour moi, ces deux exemples, on aurait pu en citer d’autres, sont assez symptomatiques d’une prise de conscience qui est en train de se faire et également d’efforts concrets pour traduire cette prise de conscience en actes qu’on peut voir et qu’on peut suivre pour voir jusqu’où ça peut mener, les efforts des femmes pour une meilleure prise en compte de leurs droits.
Question 6
Séraphin Banaganda/ Radio télé Mont Bleu (Bunia) : Ma question s’adresse au porte-parole civil de la MONUSCO. Après la signature de l’Accord de paix entre la milice FRPI, je dirais l’ex-groupe armé FRPI, et le Gouvernement congolais, que fait la MONUSCO, ou bien que compte faire la MONUSCO, pour permettre aux deux parties signataires de respecter leurs engagements afin d’un aboutissement heureux du processus ?
Question 7
César Ndahora/ Radio Fides Tujenge (Bunia) : Ma préoccupation concerne le territoire de Djugu. Qu’est-ce que la MONUSCO compte faire avec son partenaire le Gouvernement congolais après la signature de l’Accord de Gety, qui a pris 20 ans, pour que ça n’atteigne pas une ou deux décennies comment faire ? Et par rapport aux dialogues que la MONUSCO a accompagnés entre les différentes ethnies dans le territoire de Djugu mais sans faire participer les vrais acteurs des exactions, comme pour la rencontre de Mahagi ?
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Merci. Concernant l’Accord avec les FRPI, comme vous le savez, la MONUSCO était témoin de cette signature entre le gouvernement et la Force FRPI. Il y a des engagements qui ont été pris des deux côtés, qui sont des engagements propres au Gouvernement et des engagements propres aux FRPI.
De son côté, ce que la MONUSCO va faire, c’est donc ce que j’ai décrit dans mon propos d’introduction – il y a une préparation d’un site de cantonnement qui est en cours, et ensuite, il y a tout un ensemble de projets de réintégration communautaire qui va être soutenu par la MONUSCO. L’idée, c’est qu’il faut que les communautés qui absorbent les anciens combattants, et les anciens combattants eux-mêmes, puissent bénéficier d’opportunités de développement qui profitent à toute la communauté, afin de permettre à la paix de se stabiliser, de se solidifier. Cela passe aussi par un travail de réconciliation et par la mise en place de mécanismes de dialogue et de discussions, de recherches de solutions par le dialogue et par la paix, pour éviter un retour aux armes.
Donc il y a des engagements gouvernementaux, il y a des engagements FRPI, et il y a un soutien de la MONUSCO pour ce qui, pour nous, représente une opportunité sans précédent de paix dans le territoire.
J’ajouterais que c’est le cas aussi pour le travail de réconciliation communautaire qui a été évoqué dans le deuxième question : partout où il y a des tensions communautaires, notre démarche est de travailler à réconcilier les communautés, à créer les conditions d’un dialogue, et à identifier les causes profondes de ces tensions.
Il faut, comme vous le faites remarquer, identifier les bons interlocuteurs et c’est un travail dans lequel les Chefs de bureaux de la MONUSCO sur le terrain sont engagés, pour parler avec les représentants des différentes communautés pour soutenir le travail de réconciliation.
On voudrait insister sur le fait que dans le travail de réconciliation, nous considérons que c’est la justice qui est le meilleur moyen de stabiliser. C’est pourquoi nous soutenons le renforcement des fonctions régaliennes de l’Etat et nous accompagnons l’autorité de l’Etat sur tout le territoire.
L’action militaire, c’est vrai que nous pouvons y avoir recours, en amont et en aval, pour mettre hors d’état de nuire les criminels et mettre la pression sur les groupes armés afin qu’ils rendent les armes. Mais nous pensons qu’il faut avant tout mettre en place des mécanismes pacifiques de résolution des conflits, et ça passe par la justice : si je suis victime d’une attaque, j’ai quelqu’un vers qui me tourner qui représente l’autorité de l’Etat et qui va permettre de trouver la solution.
Dans le même temps, il faut aussi ramener des opportunités de développement pour stabiliser une région et la sortir du conflit de manière durable. Et c’est quelque chose à laquelle on travaille avec nos partenaires, notamment les Agences, Fonds et Programmes des Nations Unies, qui vont devoir aussi soutenir la réintégration communautaire.
Question 8
Nénette Ngendo/ L’Opinion : Une question pour Madame Awa. Etant donné que l’actualité est dominée par l’apparition du coronavirus en RDC, qui se superpose au Mois de la Femme, quelles précautions les femmes doivent-elles prendre pour lutter contre cette pandémie ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Merci Nénette de poser cette question. Je pense que le porte-parole civil vient de parler des précautions qu’il faut prendre. Il y a des instructions qui ont été données, ces instructions sont valables aussi bien pour les femmes que pour les hommes.
Mais c’est clair que compte tenu du rôle de la femme dans le suivi de la famille, les enfants et tout, peut-être que ces précautions sont encore plus importantes pour elle, et nous renouvelons ces conseils-là : que les gens suivent le protocole qui a été déterminé et fassent attention, parce que c’est une maladie qui, comme vous le voyez, est en train de se répandre dans plusieurs pays, et il faut faire preuve de beaucoup d’attention, faire preuve de beaucoup de précautions, pour garder la santé non seulement de soi, de sa famille, mais aussi de la communauté.
Question 9
Gabriel Wamonia/ Radio Okapi (Goma) : Ma question s’adresse au porte-parole militaire – que dit la MONUSCO, partenaire du gouvernement congolais, par rapport à la situation sécuritaire dans les territoires de Masisi, Lubero et Walikale, où la milice des NDC Rénovés de Guidon Shimaray installe son administration avec une police qui porte la même tenue que la Police nationale congolaise.
Porte-parole militaire de la MONUSCO [Lieutenant-colonel Claude Raoul Djehoungo] : J’ai bien entendu la question mais je crois que je vais plutôt retourner la question à Mathias. Je crois que j’ai parlé d’un travail de sensibilisation et c’est là que ce travail de sensibilisation a tout son sens : nous avons les Forces armées de la République démocratique du Congo et la Police Nationale Congolaise qui sont les seuls responsables et détenteurs de l’usage de la violence légitime.
Aucune autre force ne devrait être autorisée pour, soi-disant, protéger les populations. C’est là que le gouvernement de ce pays et la MONUSCO, bien entendu, doivent pouvoir parler franchement pour savoir qui fait quoi. La Force est là pour accompagner les FARDC sur le terrain, et la PNC sur le terrain. Voici ce que je peux dire.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : J’ajouterais que c’est un problème auquel les militaires et les policiers sont effectivement confrontés – et y compris pour la MONUSCO, ça complique souvent les choses – c’est que parfois les représentants des groupes armés ou des personnes non habilitées portent effectivement les uniformes nationaux.
C’est quelque chose sur lequel on travaille avec nos partenaires congolais, c’est effectivement une situation qui n’est pas acceptable, non plus pour les FARDC et la PNC, et on essaye de travailler à ce problème qui est effectivement une réalité.
Question 10
Josué Musole/ Radio Neno La Uzima (Bukavu) : C’est chaque année qu’on organise des manifestations des femmes pour promouvoir les droits de la femme, mais la femme pleure toujours que ça ne va pas. Qu’est ce qui faudra faire selon vous pour que les droits de la femme soient effectifs ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Vous savez, c’est parce que justement, on n’a pas encore atteint l’objectif d’avoir zéro discrimination à l’égard des femmes, une représentation paritaire des femmes, un accès égal à l’autonomisation économique, que cette Journée internationale de la femme se justifie, et qu’un Mois de la femme se justifie.
Donc ces manifestations, ces célébrations constituent un moment où on s’arrête pour faire le bilan de ce qui a été réalisé, ce qui a marché qu’on doit consolider, ce qui reste un défi qu’on doit aborder, et pouvoir définir une stratégie pour avancer.
Donc je vous réponds en vous disant : justement, cette année, comme les années passées, il y a de nouvelles stratégies qui se dégagent pour pouvoir répondre aux défis qui continuent à persister, mais des efforts qui sont fournis également pour consolider les résultats qui ont été acquis et je peux vous garantir que même si on a encore énormément de défis, il y a également des résultats qui encouragent à continuer les efforts.
Question 11
Jaël Mulowayi/ Actu30 : Lorsque les femmes de RDC, précisément celles de Kinshasa, lient la Journée internationale des droits de la femme au port du pagne et qu’elles se livrent à des activités festives, qu’est-ce que vous pensez de ça ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Ce que j’en pense, c’est que les femmes ont le droit d’appliquer ce qui correspond à leur culture. Nous sommes dans un pays où le port du pagne a une valeur. Et manifester la célébration en portant son pagne, cela correspond exactement à la culture congolaise. Rigoler, s’amuser, s’accorder un moment où on se fait plaisir est un droit. Et si c’est une fois dans l’année que les femmes peuvent se retrouver entre elles, rigoler entre elles, se faire plaisir entre elles, il faut encourager cela. Ce que je veux dire, c’est que l’un n’exclut pas l’autre.
Question 12
Prince Mayiro / 7sur7.cd : J’ai deux petites questions. J’aimerais que vous clarifiiez le rôle que joue la MONUSCO dans les enquêtes sur la mort du général Delphin Kahimbi. Et la deuxième question, est-ce que la MONUSCO est prête à apporter son soutien technique ou matériel à la lutte contre le coronavirus comme c’était le cas pour Ebola ?
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Concernant l’enquête sur la mort du général Delphin Kahimbi, je pense que nous avons clarifié déjà notre rôle et je pense que le porte-parole du président s’est aussi exprimé sur les ondes de la RTNC lundi soir.
La MONUSCO n’a pas un mandat pour mener des enquêtes judiciaires. Ce n’est pas la MONUSCO qui rend la justice au Congo. Donc en l’occurrence, la MONUSCO a apporté un soutien technique et scientifique à l’enquête qui est en cours menée par les autorités congolaises, ce soutien a été apporté à la demande des autorités congolaises. Et donc nous n’avons pas de commentaires à faire sur une enquête qui est en cours et qui une fois encore est menée par les autorités judiciaires nationales. En ce qui concerne le soutien potentiel à la lutte contre le coronavirus, vous savez la MONUSCO est ouverte à tout type de soutien que les autorités peuvent lui demander. Après on a des limites, évidemment on ne peut pas tout faire. Mais à la base, nous sommes là pour soutenir les autorités, à chaque fois que les autorités nous font une demande de soutien comme c’est le cas pour l’enquête que je viens de mentionner, comme c’est le cas aussi pour la réponse contre Ebola à laquelle nous avons contribué en sécurisant des zones et notamment la zone de Biakato, on est disponible et disposé à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour soutenir les autorités et le gouvernement.
Question 13
Siromidi / Journaliste-caméraman indépendant (Beni) : Ma question est adressée à Mme Awa. Le monde entier a célébré ce 8 mars la journée internationale de la femme pendant qu’à Beni les femmes ont marché pour déplorer le silence de la communauté internationale face aux massacres à Beni depuis 2014. Qu’est-ce que vous en dites ?
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Ce que j’en dis, je pense que je l’ai déjà dit au début de mon intervention. Nous restons solidaires de femmes de Beni et nous avons une pleine conscience des difficultés auxquelles les femmes de Beni sont confrontées. Nous essayons du côté où nous sommes, même si nous ne le publions pas sur tous les toits, d’apporter notre appui aux femmes de Beni pour qu’elles puissent faire face à certains des défis auxquels elles sont confrontées.
Je répète qu’il y a eu, il y a quelques semaines, une délégation des femmes leaders d’Afrique section de la RDC qui s’est rendue à Beni pour une mission de solidarité et pour avoir des échanges directs. C’était pour la première fois que ce réseau se rendait dans une mission de solidarité et à Beni. Et ce réseau étant appuyé par ONU Femmes, nous pensons que c’est également une façon de s’assurer que le message est porté aux femmes de Beni.
Donc nous continuerons dans les prochaines semaines ou les prochains mois, cela se traduira en termes plus concrets. Mais nous continuons de dire aux femmes de Beni que nous saluons votre résilience, nous saluons votre courage et nous sommes solidaires avec vous dans les défis auxquels vous êtes confrontées.
Je pense que le message qui s’adresse à la communauté internationale est entendu par la communauté internationale. Mais en ce qui nous concerne, par rapport aux droits des femmes de Beni, nous continuerons à unir nos efforts avec ceux des autres qui sont conscients qu’il y a des choses à faire pour améliorer la situation.
Question 14
Mamytha Bangulu/RTNC : Ma préoccupation est de savoir chaque année en RDC on a toujours assisté aux différentes manifestations. On voit les femmes porter des pagnes. Après avoir défilé, elles vont aller boire et manger. Et maintenant, d’un autre côté, nous voyons les mamans qui fabriquent la Chikwang n’ont pas des machines. Est-ce que cette année, vous ne pouvez pas penser aussi à ces femmes-là, les femmes paysannes-, en fabriquant peut-être des machines pour les aider à faire ce qu’elles ont toujours fait.
Représentante d’ONU Femmes en RDC [Awa Ndiaye Seck] : Nous avons un programme qui s’appelle AgriFed (Agriculture Femme et développement durable) qui justement s’active dans le domaine du manioc et appuie les femmes congolaises actives dans ce domaine en leur donnant d’abord une formation théorique, ensuite une formation pratique.
Aujourd’hui ces femmes-là, si vous les voyez, elles ne sont peut-être pas très nombreuses à notre goût mais elles parviennent à utiliser la racine de manioc pour en faire du spaghetti, des samossas, des cakes, des gaufres et des crêpes. En améliorant l’emballage, elles parviennent à améliorer donc les revenus qu’elles tirent de cela. Maintenant, il faudra qu’on aille à l’échelle et que cette initiative puisse toucher le maximum de femmes congolaises. Nous sommes sur cela. Avec l’appui de nos partenaires, nous espérons que beaucoup plus des femmes en bénéficieront cette année.
Porte-parole de la MONUSCO par intérim [Mathias Gillmann] : Je vous remercie beaucoup. Merci à Beni d’avoir été présent avec nous aujourd’hui. C’est la fin de cette conférence de presse. Merci aux auditeurs de Radio Okapi pour leur fidélité. Nous vous rendons l’antenne.