Des mines aux machines à coudre
Avec l’appui de l'UNICEF, des jeunes filles sorties des carrières minières du Lualaba se forment en couture et redéfinissent leur avenir
Dans une région marquée par la pauvreté et l’exploitation minière, l'histoire de Benoda, 22 ans, éclaire un chemin d'espoir et de résilience. Née dans une famille de neuf enfants, Benoda a vécu des années difficiles dans les mines avant de découvrir une nouvelle vocation grâce à un programme de l'UNICEF.
Benoda travaillait dans une carrière artisanale de cobalt à Tshala, où elle nettoyait les minerais extraits par les creuseurs. « C’était un milieu difficile, où de nombreux incidents se produisaient. Les insultes étaient courantes, et certaines filles subissaient des viols, » raconte-t-elle. Benoda rêvait de poursuivre des études, un rêve rendu impossible par la pauvreté de ses parents.
De nombreuses familles à Tshala dépendent du travail des enfants dans les mines artisanales pour lutter contre la pauvreté. Les enfants y portent souvent de lourdes charges, sont exposés à la poussière ou des substances nocives, et travaillent avec des outils dangereux.
L’UNICEF s’engage activement dans la lutte contre le travail des enfants et des adolescents dans les mines artisanales à travers l’approche novatrice du Travail Social de Modélisation (TPS+). Cette approche met l’accent sur une prise en charge de proximité via des travailleurs para-sociaux qui servent de relais aux assistants sociaux de l’Etat au sein des communautés. Ils identifient les enfants vulnérables et les orientent vers les services sociaux de base.
Nous sensibilisons les parents sur les conséquences à long terme du travail des enfants dans les mines. Ils doivent comprendre que la misère ne justifie pas le sacrifice de l’avenir de leurs enfants », explique Barthélemy, l’un des travailleurs para-sociaux de Tshala.
Benoda a été l'une des premières bénéficiaires de ce programme. « Quand les travailleurs para-sociaux sont arrivés, leur mission était de nous offrir une formation pour sortir des mines. J’ai été inscrite à une formation en couture, et bien que j’aie douté au début, cette opportunité a transformé ma vie », confie-t-elle.
Elle a suivi une formation intensive de six mois en coupe et couture. Sa détermination l'a conduite à exceller dans cette formation. Par la suite, elle a reçu les outils nécessaires pour démarrer son propre atelier de couture. Benoda est désormais une couturière accomplie, fière de pouvoir subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille.
Son succès l’a même propulsée au rang de formatrice. Avec le soutien de l'UNICEF, elle a établi un nouvel atelier sur sa parcelle, où elle accueille désormais des apprenties. En quelques mois, elle a formé plus d’une dizaine de jeunes filles sorties des mines.
Parmi ses élèves, Dada, 19 ans, partage une histoire similaire. Dada, tout comme Benoda, a passé une grande partie de son enfant dans les carrières minières. Elle vendait des beignets avec ses frères dans une carrière de Tshala au lieu d’aller à l’école.
Mère d’une petite fille âgée de 17 mois, sa vie a radicalement changé lorsqu’elle a quitté la mine pour se former à un métier. « La coupe et la couture m’ont ouvert de nombreuses opportunités. Je parviens à subvenir à mes besoins et à payer les frais de scolarité de mes frères, » dit-elle avec fierté.
Le rêve de Dada est de suivre les traces de Benoda et d’ouvrir son propre atelier pour aider d'autres jeunes à sortir des mines. « Il n’y a pas d’avenir dans les carrières car l’argent gagné est minime et les minerais sont épuisables. La formation, elle, ouvre des portes insoupçonnées, » conclut Benoda.
En travaillant avec la Division des Affaires Sociales, plus de 1.000 enfants ont été identifiés par les travailleurs para-sociaux et sortis des mines artisanales de Tshala depuis 2022. Parmi eux, 150 ont été inscrits à l’école, et 350 ont suivi des formations professionnelles en coupe et couture, conduite automobile, menuiserie, maçonnerie, esthétique, informatique, soudure et ajustage.