Transcription de la conférence de presse ONE UN du 15 juin 2022 à Kinshasa
Cette conférence animée par la porte-parole adjointe de la MONUSCO, Ndeye Khady Lo, recevait la Représentante du HCR, Mme Angel Dikongue comme invitée spéciale
La conférence de presse des Nations Unies était animée à partir de Kinshasa par la porte-parole adjointe de la MONUSCO, Ndeye Khady Lo.
Porte-parole adjointe de la MONUSCO [Ndeye Khady Ndeye Lo] : Bonjour à tous, merci aux auditeurs de Radio Okapi et bienvenue dans cette nouvelle conférence de presse des Nations Unies en République démocratique du Congo. Je m’appelle Ndeye Khady Lo, je suis la porte-parole adjointe de la Monusco et j’anime cette conférence de presse en l’absence de Mathias Gillmann.
Nous sommes aujourd’hui ici à Kinshasa avec Mme Angel Dikongue – Atangana, Représentante du Haut-Commissariat pour les Refugies (HCR) en RDC et Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO. Nous ne parvenons pas pour le moment à nous connecter avec nos bureaux de Goma, Bunia et Beni. Et nous espérons qu’ils arriveront à nous rejoindre en cours.
La Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies et cheffe de la MONUSCO, Mme Bintou Keita réitère son appel à la cessation des hostilités, à la désescalade et à la retenue dans l’est de la République démocratique du Congo. Elle invite les différents acteurs du conflit à la compassion pour que cessent les massacres des personnes civiles, surtout des femmes et des enfants.
Madame Bintou Keita appelle aussi les groupes armés congolais à donner une chance à la main tendue par les chefs d’Etats Felix Tshisekedi Tshilombo et Uhuru Kenyatta à travers le processus de Nairobi.
La MONUSCO invite les groupes armés à participer au Programme Désarmement, Démobilisation, Réintégration communautaire et Stabilisation (PDDRCS). Ce qui contribuera à ouvrir une nouvelle page de coexistence pacifique au sein de leurs communautés respectives.
Sur les incidents frontaliers entre le Rwanda et la RDC, les Nations Unies saluent la nomination par l'Union africaine du président angolais João Lourenço pour désamorcer les tensions et appuient pleinement ces efforts politiques.
Consciente du rôle primordial des femmes dans tout processus de paix, la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies en RDC a rencontré au début du mois de juin à Goma dans le Nord-Kivu le Réseau des femmes leader africaines (AWLN).
La cheffe de la MONUSCO préconise ainsi un dialogue intercommunautaire élargi dans chaque territoire et chaque province incluant toutes les composantes de la société congolaise sans discrimination pour examiner les causes profondes de la crise dans l’Est de la RDC et y trouver des solutions durables.
La MONUSCO invite à cet effet les autorités à intégrer les femmes et les jeunes dans les différentes initiatives en cours, notamment les consultations de Nairobi, et l’opérationnalisation du PDDRCS. A cet effet, différentes initiatives ont été entreprises non seulement au niveau local à travers les bureaux de terrain de la MONUSCO.
Le 10 juin dernier, la cheffe de Bureau de la MONUSCO à Goma, Mme Laila Bourhil, s’est entretenue avec le Directeur du Uhuru Center et son équipe pour soutenir un mouvement solidaire de jeunes pour la paix et basé sur la communication non violente. L’idée est de créer aussi un espace de dialogue et d’expression citoyenne pour les jeunes qui se concentrera non seulement sur les questions de non-violence mais aussi sur la lutte contre la désinformation. Toutes ces activités s’inscrivent dans un engagement continu et régulier de nos bureaux de terrain avec non seulement les jeunes mais aussi les leaders religieux et communautaires ainsi que toute personne influente qui peut aider à créer un climat d’apaisement et d’union.
Les Nations Unies sont par ailleurs profondément préoccupées par le nombre de rapports faisant état d'une augmentation des discours de haine dans le pays contre certaines communautés, notamment dans le contexte de la résurgence du M23. Partout en RDC, les discours de haine doivent être combattus de manière proactive.
A ce titre, la MONUSCO a réuni le 6 juin dernier à Goma les dirigeants communautaires Hunde, Hutu, Nande, Nyanga, Tembo et Tutsi pour les sensibiliser à la cohésion sociale et à la coexistence pacifique entre communautés.
Une initiative similaire a également été organisée dans le territoire de Rutshuru et où, là encore, les leaders communautaires ont publié un communiqué appelant à la cohésion et à la paix entre les différentes communautés.
A Uvira et Baraka, dans le Sud-Kivu cette fois, la MONUSCO a facilité depuis le début du mois de juin une série d`activités pour renforcer la cohésion sociale, réduire la violence intercommunautaire et lutter contre les discours de haine.
Sur un autre volet, la MONUSCO félicite le Parlement congolais pour le vote de la loi sur la promotion et la protection des peuples autochtones adoptée le vendredi 10 juin 2022 par le Senat congolais. La mission a participé activement au plaidoyer ayant abouti à cette avancée majeure.
Enfin, en prélude à la fermeture du Bureau de la MONUSCO au Tanganyika le 30 juin prochain, l’Equipe pays des Nations Unies dispose désormais d’un plan de travail conjoint pour la province couvrant la période 2022 à 2023. Il a été formulé la semaine dernière au cours d’un atelier de trois jours organisés par le Bureau du Coordonnateur résident.
J’invite maintenant le Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO, pour faire le point sur la situation sécuritaire.
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : Messieurs et Dames bonjour. Au cours des deux dernières semaines, la Force a continué par effectuer des patrouilles multiformes, des reconnaissances aériennes, des escortes et de nombreuses activités opérationnelles. La plupart des actions de la Force sont toujours axées sur l'application et le soutien du mandat, la protection des civils, le soutien aux institutions de la RDC. En outre, la Force de la MONUSCO aide également de manière constante FARDC avec un soutien logistique, des renseignements, des conseils opérationnels, du soutien médical, de partage d'informations, l'évacuation des blessés et surtout la formation en général. Le tout dans la recherche du renforcement des relations avec les FARDC dans la livraison de la protection des civils.
En Ituri, la Force de la MONUSCO a effectué des patrouilles dans la zone en général pour atténuer les atrocités de CODECO contre les sites de déplacés internes et la communauté Hema. Concernant le document signé par les miliciens CODECO initiant leur volonté d'adhérer au processus de Nairobi pour cesser les hostilités contre les FARDC, la PNC et les civils, la Force de la MONUSCO s'intéresse étroitement à la situation existante.
L'opération dans la région de Rutshuru a commencé peu après que le M23 a lancé une attaque contre les troupes de la MONUSCO à partir de plusieurs directions. Les troupes de la Force de la MONUSCO ont riposté proportionnellement en utilisant les moyens les plus appropriés. Depuis le 22 mai 2022, les troupes de la MONUSCO sont déployées dans la zone générale pour dissuader le M23 de commettre de nouvelles atrocités.
Plus tôt le 13 juin 2022, la position de Bunagana était tenue par les FARDC avant et jusqu’à ce que le M23 ne s’en empare. Les troupes onusiennes sont en position défensive à environ 4 km de Bunagana. Avec les activités opérationnelles en cours dans la zone générale de Rutshuru, la Force, tout en se soutenant mutuellement des FARDC envisage de reprendre la position de Bunagana pour normaliser la vie de la population locale.
A Beni, la sécurité reste préoccupante, toutefois les troupes de la MONUSCO sont déployées à Mayi Moya et Mutwanga pour surveiller toutes les activités des ADF et ont pris des mesures décisives contre ce groupe armé. En raison de la situation instable existante, les troupes de la MONUSCO ont envoyé des soldats pour réagir rapidement, contrôler et protéger les civils. La Force continue d'être vigilante afin de maîtriser toutes les éventualités.
Au Sud-Kivu, la situation générale continue d’être instable en raison des affrontements entre les éléments Red Tabara Imbonerakure et Maï-Maï Kirikichoe. Les forces de la MONUSCO effectuent des patrouilles de jour et de nuit dans la zone pour accroître la protection des civils et réduire l’action des groupes armés. En deux semaines, plusieurs cadres de groupes armés se sont rendus aux forces de la MONUSCO par peur des combats dynamiques et des conditions de vie misérables qu'ils vivent.
L’intensification des patrouilles de la Force MONUSCO et du nombre des opérations a permis de réduire les attaques des groupes armés contre les personnes déplacées et ce pour l’ensemble du territoire concerné. Nos forces dans tous les secteurs s'acquittent avec diligence et détermination de leurs missions pour assurer la protection des civils en RDC. Merci pour votre attention.
Porte-parole adjointe de la MONUSCO [Ndeye Khady Ndeye Lo] : Merci Lieutenant-colonel, nous allons maintenant faire le point de la situation humanitaire avant de passer la parole à notre invitée, la Représentante du HCR en RDC.
Selon Ocha, des milliers d’habitants de Bunagana, y compris environ 5 000 personnes déplacées et retournées se sont réfugiées en Ouganda voisin et plus de 25 000 personnes auraient été contraintes de fuir leurs villages. La reprise des affrontements aux environs de Bunagana a affecté les activités humanitaires. Le 12 juin dernier, le trafic a été interrompu sur l’axe reliant Burayi et Bunagana, où des milliers de personnes déplacées et retournées attendent l’assistance depuis le début des violences en mars dernier. Une mission inter-agence planifiée par OCHA pour demain le 13 juin entre Rutshuru Centre et Bunagana (environ 27 km) a été annulée. Les partenaires humanitaires continuent de suivre la situation sécuritaire qui demeure très volatile.
Je passe maintenant la parole à Madame Atangana.
Représentante du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés en RDC [Mme Angel Dikongue – Atangana] : Merci Mesdames et messieurs de la presse présents aux studios à Bunia, à Goma et à Kinshasa. Bonjour mesdames et messieurs les auditeurs de la Radio Okapi qui nous suivez partout à travers le monde. J’ai l’honneur de me retrouver devant vous ici pour la première fois depuis ma prise de fonction, début avril dernier, en ma qualité de Représentante de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en République démocratique du Congo depuis fin mars de cette année.
Comme vous le savez, chaque année, nous célébrons la Journée mondiale du réfugié le 20 juin. Le 20 juin, c’est dans quelques jours.
C'est l'occasion de réfléchir aux besoins de 100 millions de personnes déplacées de force dans le monde, c’est-à-dire des réfugiés, déplacés internes ; et de nouer des partenariats qui sont si cruciaux pour protéger et chercher des solutions durables pour ces femmes, ces hommes, ces filles et ces garçons.
Cette année, dans le monde entier, nous réfléchissons sur le thème « Toute personne a le droit de rechercher la sécurité - qui que ce soit, d’où qu’elle vienne et quel que soit le moment où elle a été forcée de fuir ».
Dans le contexte de la RDC en 2022, où les besoins des personnes déplacées et des communautés d’accueil ne cessent de croître, la solidarité de tous les acteurs, exprimée par l’expression « on est ensemble », reste primordiale.
Nous observons à chaque fois la légendaire hospitalité traditionnelle des communautés congolaises qui aident leurs compatriotes à trouver la sécurité en les accueillant et en partageant leurs ressources limitées avec les personnes déplacées, quelles qu’elles soient.
En réponse à l’afflux de réfugiés centrafricains dans le Nord-Ubangi, le Sud-Ubangi et le Bas-Uele où vivent plus de 209 000 réfugiés de ce pays-là, la Centrafrique, nous sommes témoins du soutien offert par des communautés qui luttent déjà pour leurs ressources.
90 % des personnes déplacées dans le Nord-Kivu sont hébergées dans des familles d’accueil qui partagent les maigres ressources dont elles disposent, alors que les affrontements armés provoquent des déplacements forcés et pendulaires pour la plupart du temps.
La RDC a maintenu une longue tradition d’hospitalité envers les ménages déplacés. En octobre, nous allons célébrer avec la Commission Nationale pour les Réfugiés (CNR) le 20ème anniversaire de la Loi N° 021/2002 du 2002 portant statut des réfugiés en République démocratique du Congo.
C’est dire que ce pays fait des efforts nonobstant les contraintes majeures que nous connaissons.
Dans ce monde étroitement interconnecté, ce sont les personnes déplacées de force qui paient le prix des conflits à plusieurs reprises.
Des événements aussi lointains que l’Ukraine ont un impact sur les personnes déplacées ici chez nous et leurs communautés d’accueil en RDC, le conflit provoquant des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement, y inclus des stocks alimentaires essentiels et de fortes augmentations des prix des produits de base, notamment des hausses de prix de carburant. Nous avons tous vu des files d’attente malgré ces hausses de prix.
Le HCR s’est engagé à rester et à continuer de fournir des services aux personnes déplacées et vulnérables dans le besoin ; et peut continuer à jouer un rôle essentiel pour prévenir et atténuer les crises humanitaires. Cependant, ces facteurs font augmenter les coûts opérationnels de nos programmes humanitaires et menacent d’aggraver les crises existantes en augmentant les risques de protection auxquels les populations vulnérables sont déjà fortement confrontées.
La protection des personnes contraintes de fuir est une responsabilité collective et mondiale. Ainsi les pays et les communautés, comme la RDC, qui reçoivent et accueillent un grand nombre de personnes déplacées, par rapport à leur population et leur économie nationale, ont besoin d’un soutien et d’une solidarité sans faille de la part de la communauté internationale.
Avec le gouvernement, la société civile, les bailleurs de fonds et d’autres partenaires, nous avons réussi à rechercher et à mettre en œuvre des solutions pour les personnes déplacées dans diverses régions de la RDC.
Ainsi en 2022, nous avons rapatrié près de 2 000 personnes venues de la République Centrafricaine pour qu’elles retournent chez elles apres avoir bénéficié de l’hospitalité légendaire de la RDC.
En 2021 et 2022, nous avons rapatrié près de 17 000 personnes de la RCA, du Burundi, du Rwanda et du Soudan du Sud pour qu’elles retrouvent la sécurité et la dignité dans leurs pays respectifs.
En mai dernier, grâce à une collaboration avec ses partenaires, le HCR a achevé la construction de deux écoles primaires au Kasaï qui accueillent des déplacés internes ainsi que les communautés qui les accueillent.
Toujours au mois de mai, cette fois à Aru, nous avons fait bénéficier à 200 ménages dont 60 de la communauté d’accueil, des outils agricoles et nous les avons fait former sur l’utilisation de ces outils afin d’augmenter leur chance de garder la sécurité alimentaire.
Enfin, des interventions comme celles-ci, vous le verrez bien, sont justement de nature à aider les gouvernements à mettre en œuvre ou à garder le cap sur le plan national de développement stratégique.
Les engagements de la RDC au Forum mondial des réfugiés qui s’est tenu en 2019, comme vous le savez, sont également sauvegardés à travers ces interventions du HCR ainsi que les engagements par rapport au développement durable de l’agenda 2030 que nous connaissons tous.
Il est important, dans toutes les zones de déplacement en RDC, de soutenir le Nexus, c’est-à-dire, le lien entre l’aide humanitaire, le développement et la paix, afin que l’assistance vitale puisse être fournie de manière efficace, en même temps que la vision d’un avenir meilleur pour les personnes déplacées de force.
Afin de fournir une réponse holistique et de contribuer au bien-être des communautés déplacées et d’accueil, nous devons impliquer les acteurs humanitaires et du développement dans notre planification ainsi que dans la mise en œuvre du travail que nous faisons que ce soit pour les urgences ou pour les autres interventions dans le Grand Kivu et ailleurs.
Dans la région du Kasaï, le HCR et ses partenaires ont travaillé en étroite collaboration avec les autorités, les chefs coutumiers et les ONG dirigées par les femmes pour lutter contre les violences sexistes.
Enfin, je dois La situation actuelle du Nord-Kivu nous interpelle. Depuis le 19 mai, nous avons au moins 123 000 personnes qui ont été déplacées dont au moins 8 000 qui ont traversé les frontières. Nous enregistrons des décès également y inclus des décès des personnes déplacées ou qui essaient de retourner chez elles.
Nous voulons dire à l’occasion de la Journée mondiale du réfugié, nous appelons à la solidarité et à l’engagement continu de la communauté internationale pour se rassembler, identifier et mettre en œuvre les solutions dont le rapatriement, l’intégration et la réinstallation. Ensemble, nous sommes tous plus forts.
Je vous remercie pour votre attention.
Question 1
Roger Marley Lukunga/ EDUC TV : J’ai été très heureux de vous entendre vanter plusieurs fois l’hospitalité congolaise face aux réfugiés que nous accueillons plusieurs fois. J’aimerais savoir maintenant au nom de cette hospitalité, est-il permis à tous ces voisins-là qui nous entourent d’en profiter pour nous attaquer. Et que faites-vous au nom des principes humanitaires pour faire cesser cette situation ?
Représentante du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés en RDC [Mme Angel Dikongue – Atangana] : Merci beaucoup M. Roger Lukunga. En effet, nous ne pouvons que vanter le mérite de l’hospitalité légendaire de la RD Congo. En revanche, cela n’explique en rien les velléités ou les tensions dont ce pays est victime de la part de ses voisins. Et ça, nous le déplorons fortement et nous laissons les agences plus capables que nous d’y répondre, faire leur travail.
Nous sommes ici au site de la MONUSCO et vous avez entendu mon collègue de la MONUSCO vous dire précédemment tous les efforts que cette organisation déploie aux côtés de la RDC pour sauvegarder l’intégrité territoriale de ce pays.
Donc, nous ne sommes pas du tout d’avis que l’hospitalité légendaire de ce pays doit lui valoir quoi que ce soit d’autres que de primes constructives. Je vous remercie.
Question 2
Pascal Mulegwa/ RFI : Moi, j’aimerais peut-être m’adresser au porte-parole militaire. Vous êtes sans ignorer que le gouvernement de la République démocratique du Congo accuse le Rwanda de soutenir militairement les rebelles du M23. Vous êtes sur le théâtre avec les soldats congolais, endossez-vous ces accusations du gouvernement congolais ? Vous êtes aussi sans ignorer que le gouvernement rwandais accuse l’armée congolaise de collision avec les rebelles Hutus rwandais des FDLR, apportez-vous du soutien à l’armée congolaise accusée de collision avec des milices des rebellions étrangères comme les FDLR ?
S’il faut bien reformuler la question : avez-vous vérifié que dans les rangs des forces congolaises, il n’y a pas des rebelles Hutus rwandais des FDLR ?
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : Merci pour votre question. Pour répondre à la première partie de votre question, il faut comprendre que la MONUSCO n’est pas en guerre contre le Rwanda, l’Ouganda ou toute autre nation limitrophe de la République démocratique du Congo. Ce n’est pas la raison pour laquelle nous sommes ici. Nous sommes ici pour accomplir un mandat qui consiste à protéger la population civile et à soutenir les forces de sécurité nationale à préserver l’intégrité de la République démocratique du Congo. C’est ce à quoi nous affairons.
Maintenant, pour ce qui est de la question que vous avez abordée, il existe des mécanismes notamment le Mécanisme de vérification conjoint qui est en sous ordre au Conseil des nations d’Afrique de l’Est, si je ne m’abuse, qui a la responsabilité d’établir ces faits en ce qui concerne le Rwanda ou les autres nations.
Et il ne revient pas à la Force de la MONUSCO de commenter sur la géopolitique, nous ne sommes pas dans le domaine de la géopolitique.
Pour ce qui est de votre deuxième question concernant la vérification s’il y a des FDLR au sein des FARDC, nous avons effectivement un processus de filtration de tout soutien qui est offert aux FRADC qui doit passer par ce qu’on appelle dans sa définition anglophone « Human Right Due Diligence Process, HRDDP ». Ce processus consiste justement à vérifier et à s’assurer qu’à chaque fois que la MONUSCO apporte son soutien aux FARDC, qu’il n’y ait pas dans leurs rangs des gens qui soient en collision avec des éléments négatifs ou qui ont fait l’objet ou qui font de différents types de poursuites au tribunal international, etc.
Oui, il existe un processus qui filtre ces demande-là et non, nous n’appuyions pas ce genre d’activité.
Porte-parole adjointe de la MONUSCO [Ndeye Khady Ndeye Lo] : Sur ce point, je tenais juste à ajouter que notre partenariat avec FARDC est conditionné à la politique de diligence voulue qui suppose qu’on prévienne et attenue les risques de violation des droits de l’homme et du droit international humanitaire associé à la fourniture de soutien avec des forces non onusiennes. Il ne saurait y avoir de compromissions avec notre mandat. Notre mandat est clair : nous soutenons les institutions congolaises dont l’armée, nous protégeons les civils. Et il n’y a pas de collision possible avec des groupes armés.
Question 3
Violette Nseya/ Radio Héritage : Je crois que c’est dans la suite de mon confrère de RFI. Bien qu’il y ait eu des accusations de la part de la République démocratique du Congo, mais apparemment c’est comme si la République démocratique du Congo caresse le Rwanda dans le sens du poil. Alors, dans tout ce que vous venez d’évoquer dans votre Mission, est-ce que la MONUSCO compte ou réfléchit à conseiller la RD Congo à prendre une bonne décision et/ou une piste de solution pour ne pas avoir l’accalmie mais terminer avec ce brouhaha du Rwanda ? Merci
Porte-parole adjointe de la MONUSCO [Ndeye Khady Ndeye Lo] : Merci Madame, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, Mme Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies salue l’initiative de l’Union africaine, avec la médiation du président angolais João Lourenço, visant à raffermir les liens entre le Rwanda et la RDC.
Je vous rappelle aussi que le porte-parole du Secrétaire général des Nations Unies, Stéphane Dujarric, a récemment appelé les deux parties à se retrouver autour d’une table, à favoriser la voie diplomatique pour résoudre le conflit dans l’est de la RDC.
Question 4
Yves Motalimbo Télé Plus & NewsOne/ : Une question au Lieutenant-colonel concernant la situation qui se passe notamment en Ituri, précisément dans le territoire de Mambasa. Récemment, il y a eu plusieurs manifestations anti-MONUSCO organisées dans le territoire de Mambasa, dans la cité Inyanya. La MONUSCO est aujourd’hui dans ce territoire pour chasser les CODECO et les ADF, mais la population de ce territoire s’organise pour chasser la MONUSCO, qu’est ce qui se passe entre la population et la MONUSCO ? Parce que vous avez dit qu’il y a des patrouilles multiformes qui se font pour protéger ces populations et en retour ces mêmes populations manifestent pour vous chasser.
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : Merci Monsieur pour votre question. J’aimerais répondre en disant que vous savez, les gens ne sont pas bien informés et ce n’est pas nécessairement de leur faite. D’abord, il y a beaucoup de désinformations qui circulent. Alors j’invite vos lecteurs, vos auditeurs ou la population à aller voir d’abord les communiqués de la MONUSCO qui sont très clairs et qui expliquent ce qui se passe dans la région de l’Ituri.
De plus, les FARDC maintiennent également des sites internet ou des pages d’information qui sont très éloquentes quant au soutien bilatéral qui s’opère présentement entre les Forces armées de la RDC et la MONUSCO. Donc, ces allégations, ces rumeurs ou ce à quoi vous faites référence, je n’ai pas de rapport comme quoi les gens chassent la MONUSCO. Je n’ai pas vu de rapport dans ce sens. Ce que je peux vous dire, c’est qu’effectivement il y a des gens qui peut-être ne sont pas informés ou qui ne se tiennent pas informés ou qui sont victimes de désinformation quant au rôle de la MONUSCO, quant à ce que nous faisons, quant à ce que les FARDC font également parce que nous faisons de façon collaborative. Et j’invite vos auditeurs à en prendre connaissance.
Question 5
Nenette Fwamba/ L’Opinion : Une question pour Mme Khady. Que pensez-vous de l’impact de la situation qui prévaut actuellement dans l’Est de la RDC sur les préparatifs des élections ?
Porte-parole adjointe de la MONUSCO [Ndeye Khady Ndeye Lo] : Merci Madame. La position de la MONUSCO sur les élections c’est que des élections libres, transparentes sont essentielles à la stabilité de la République démocratique du Congo. La MONUSCO est disposée à soutenir les institutions congolaises dans cet objectif en poursuivant les bons offices avec toute la classe politique congolaise et en promouvant un dialogue inclusif et consensuel pour la poursuite des réformes électorales. Et dans ce cadre, ce travail est fait par la MONUSCO, continue d’être fait quelle que soit la situation. Merci.
Question 6
Jael Mulowayi/ Actu30 : Ma question s’adresse au porte-parole militaire. Avec la montée en puissance du M23 et la prise de Bunagana. Est-ce que les drones sont aujourd’hui mis à contribution pour l’identification de l’agresseur dans la partie Est du pays, si oui comment et si non, pourquoi ?
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : Bonjour Madame, en réponse à votre question, une réponse courte : c’est oui, les ressources de collecte d’information, de renseignement de la MONUSCO sont mises à contribution dans la situation actuelle à l’intérieur des limites de la RD Congo. Alors vous parlez de drone, il peut s’agir également de vol d’hélicoptères de reconnaissance ou des choses comme ça. Comme je vous l’explique, ils sont effectivement mis à contribution, nous les employons et le résultat de ce que nous obtenons, sans rentrer dans les détails évidemment est transmis aux FARDC pour les appuyer dans leurs combats.
Question 7
Saint-Germain Ebengo/ Letonnere.info : L’arrivée massive des réfugiés dans un pays a de l’impact à la fois sur sa population et sur son économie, quels sont les moyens mis en place par le HCR pour équilibrer les mesures graphiques et économiques ?
Représentante du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés en RDC [Mme Angel Dikongue – Atangana] : Merci bien Monsieur la question. C’est une grande question. Sauf que j’ai notamment mentionné le travail en Nexus. Il vous souviendra que la charte des Nations Unies comporte trois piliers : le pilier humanitaire, le pilier développement et le pilier paix.
Donc nous, nous efforçons de travailler justement avec tous les acteurs de ces différents piliers parce que nous sommes conscients que tous seuls, nous ne pouvons pas répondre à tous ces besoins.
Alors pour résoudre la donne démographique, nous travaillons notamment avec les institutions étatiques qui ont la charge de ce volet-là, notamment les instituts de la statistique et autres. Nous travaillons avec l’UNFPA qui s’occupe beaucoup plus de recenser la population et collecter les données démographiques et agir là-dessus.
Et bien sûr, nous travaillons avec les acteurs économiques. Actuellement, nous sommes notamment en partenariat avec la Banque mondiale pour s’assurer que les réfugiés ou même les déplacés ne soient pas seulement un poids pour les communautés qui les accueillent mais que leurs avantages comparatifs ou leurs expertises respectives puissent être mis à contribution pour participer aussi au développement de ces communautés-là.
Donc, il faut les autonomiser, il faut en faire des acteurs économiques, des acteurs de développement. C’est à cela que nous travaillons. Merci.
Question 8
Venant Vudisa/ RTNC : Je m’adresse au porte-parole militaire. Nous apprenons régulièrement auprès du chargé de communication de la MONUSCIO que la Mission onusienne vient en appui aux FARDC. Mais curieusement, 20 ans après, la MONUSCO ne fait pas bénéficier de cette expertise aux Forces armées congolaises qui, régulièrement, sont attaquées. Que se passe-t-il ? Pourquoi vous ne pensez pas à ce volet de formation de nos forces armées congolaises même si ce n’est pas votre mission ? Mais, en les appuyant quand même, elles deviendraient beaucoup plus aguerries.
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : Bonjour Monsieur et merci pour la question. Excellente question. D’abord, comme vous avez dit, ce n’est pas dans le cadre du mandat à proprement parler. Cependant, il y a de la formation et une certaine forme de recyclage qu’on fait avec les Forces armées de la République démocratique du Congo. C’est sur des thèmes de base, on peut parler d’entrainement. Par exemple, nous avons des instructeurs pour les combats en jungle qui sont actifs dans l’Est, pour en nommer quand même. Et on donne aussi des formations que ça soit sur les lois des conflits armés, le respect de droits de la personne qui sont donnés aux soldats congolais à différents niveaux et j’en passe.
Donc, il y en a. Est-ce que c’est quelque chose qui est encadrée au même type que certains pays participants ? Il y a des partenaires qui sont hors MONUSCO qui donnent un entrainement beaucoup plus encadré, beaucoup plus large. Je pense à la Belgique, à la France et à d’autres pays comme ça : la Chine notamment. Non, nous ne faisons pas le même genre de travail que ces partenaires internationaux. Mais nous en faisons quand même un peu à l’intérieur des arcs de responsabilités qui nous sont donnés dans notre mandat. J’espère que ça répond à votre question ou il y avait un autre volet ? Ok.
Question 9
Albert Omba/ Numérica TV : Mon colonel, nous sommes en 2013, 2014, la MONUSCO se décide de mettre tous les groupes armés étrangers en déroute, en commençant par le M23. Une Brigade est formée par la MONUSCO, une autre par les FARDC. Il a suffi de 48h pour bouter dehors le M23. Etes-vous prête, pour la MONUSCO, à rééditer cet exploit avec la RDC pour qu’on puisse bouter en moins de 48h le M23 et nous saurons où est-ce qu’ils iront cette fois-ci ? Merci.
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : D’abord bonjour et merci Monsieur. Il faut comprendre Monsieur que le parallèle entre 2013 et aujourd’hui, il faut faire attention. Il ne faut pas faire trop de parallèles. D’abord, la situation a changé, les rapports de force ne sont plus les mêmes. Il y a deux choses qui ont changé. Nous n’avons pas là le même M23 qu’il y a 8 ou 9 ans, c’est-à-dire il n’est plus l’ombre de lui-même, il a été défait déjà une fois. Ce à quoi on assiste ici n’est pas dans la même proportion. Et le deuxième aspect qui est important à considérer est que maintenant ils font face à des FARDC qui sont beaucoup plus aguerries et beaucoup plus aptes à combattre et qui ont la volonté de reprendre d’elles-mêmes et par elles -mêmes le contrôle du territoire congolais. Ce qui n’était pas vraiment la situation la dernière fois dont vous faites allusion. Il est important de ne pas revivre la dernière guerre-là mais de comprendre bel et bien celle qui se produit présentement.
Question 10
Alain Dimuani/ Actu30 TV : Mon colonel, je ne sais pas. Vous pouvez nous aider à comprendre. Pour que le M23 attaque Bunagana aujourd’hui, ont-ils oui ou non utilisé l’Ouganda comme base-arrière, sont-ils venus de l’Ouganda ou pas ? Une dernière question : Mon colonel, je ne vous ai pas entendu nous dire clairement que le M23 est soutenu par l’armée rwandaise oui ou non ?
Lieutenant-colonel Fréderic Harvey de la Force de la MONUSCO : Ça c’est encore une fois et j’aimerais répéter ce que j’avais déjà répété à un de vos collègue. La MONUSCO n’a pas vérifié, n’a pas pu vérifier par ses propres moyens ces allégations-là. Alors, on se perd en conjoncture. Je ne peux pas répondre factuellement et de façon honnête à votre question parce que je n’ai pas les réponses à ces questions.
C’est la même chose. Et le Rwanda et l’Ouganda, nous n’avons aucune confirmation factuelle que cela soit bel et bien le cas en ce qui nous concerne.
Porte-parole adjointe de la MONUSCO [Ndeye Khady Ndeye Lo] : Merci. Avant de clôturer cette conférence de presse, je voudrais rappeler l’appel à la compassion du Représentant spécial du Secrétaire générale et cheffe de la MONUSCO en direction des groupes armés. Les personnes vulnérables, femmes et enfants dont l’horizon s’arrête au barbelés délimitant les sites de déplacés et les camps de refugies ont déjà payé un trop lourd tribut dans ce conflit qui dure depuis plusieurs années, le sang a trop coulée avec les massacres, les atrocités, les tueries de masse. Il est temps de répondre aux multiples appels à la paix et de participer aux initiatives pour une paix durable et définitive partout en RDC.
Et je rappelle que Madame Bintou Keita, il y a quinze jours à Goma, a donné des pistes pour arriver à régler le problème M23 notamment en suivant une approche à 3 volets : le premier volet c’est l’approche militaire, une réponse militaire ferme aux attaques et provocations en appui aux FARDC en ayant à cœur la protection des civils dans le respect du droit international humanitaire et les droits de l’homme.
Elle a aussi parlé d’une réponse politique qui veut que tout le monde s’engage de manière transparente et tout le monde collabore de la même façon. Une réponse opérationnelle qui fait que l’opérationnalisation aboutie du programme de Désarmement, Démobilisation et Réintégration communautaire est une réalité parce que sans un programme pareil mis en œuvre de façon aboutie, on va toujours courir le risque d’avoir des combattants qui se regroupent et qui reforment des groupes et continuent de menacer la paix en République démocratique du Congo.
Sur ce, je vous remercie d’être venus nombreux à cette conférence de presse. Nous n’avons pas pu nous connecter avec nos collègues de Goma, Beni et Bunia. Nous vous donnons rendez-vous dans 15 jours pour une autre conférence de presse des Nations Unies. Merci