Transcription de la conférence de presse ONE UN en RDC du 4 mai 2022 à Kinshasa
La conférence de presse de ce jour reçoit Dr Amédée Prosper Djiguimde, Chargé de bureau de l'Organisation Mondiale de la Ssanté, comme invité spécial
La conférence de presse des Nations Unies était animée à partir de Kinshasa par Mathias Gillmann, porte-parole de la MONUSCO et coordonnateur du Groupe de communication des Nations Unies.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Bonjour à tous, merci aux auditeurs de Radio Okapi et bienvenue dans cette nouvelle conférence de presse des Nations Unies en République démocratique du Congo.
Avec nous aujourd’hui ici à Kinshasa, Dr Amédée Prosper Djiguimde, qui est le Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC. Nous sommes connectés comme d’habitude avec nos bureaux à Goma, Bunia et Beni.
D’abord sur le processus de Nairobi : les Nations Unies saluent l'orientation donnée au processus de Nairobi, une consultation inclusive avec les groupes armés, pour identifier les mesures d'accompagnement nécessaires à leur désarmement volontaire. Nous exhortons tous les groupes armés à participer inconditionnellement au processus, à cesser immédiatement toutes les hostilités et à désarmer volontairement et à rejoindre de bonne foi le processus national P-DDRCS.
Nous exhortons également tous les groupes armés étrangers à déposer les armes et à être rapatriés sans condition dans leurs pays d'origine respectifs.
Les Nations Unies s'engagent à soutenir les autorités nationales et les autres acteurs nationaux et régionaux pour assurer la mise en œuvre effective de la nouvelle stratégie nationale P-DDRCS vers la paix et la stabilité à long terme en RDC.
Les Nations Unies encouragent également la facilitation kenyane du processus de Nairobi et le gouvernement de la RDC à consulter les victimes des groupes armés et les représentants des communautés locales, qui devront cohabiter et vivre en paix avec les ex-combattants. Nous encourageons en particulier la consultation des femmes et des filles, qui sont à la fois les principales victimes des groupes armés et des acteurs essentiels pour la reconstruction de la cohésion sociale et du bien-être communautaire nécessaires à la réussite du processus de réintégration des ex-combattants.
Les Nations Unies appellent enfin à un dialogue continu, franc et ouvert entre toutes les parties prenantes régionales en vue de résoudre les tensions et de renforcer la confiance dans la région et dans l'Est de la RDC. L'ONU continuera d'appuyer les pays de la région dans les efforts de consolidation de la paix à plus long terme visant à rendre des comptes et à consolider les acquis en matière de paix et de sécurité.
Je voulais aussi vous signaler qu’en amont de la Journée internationale des Casques bleus, célébrée le 29 mai, le Département des opérations de paix des Nations Unies a lancé une campagne numérique, #PeoplePeaceProgress.
Chaque jour, les soldats de la paix des Nations Unies travaillent pour protéger des millions de personnes vulnérables dans les situations politiques et sécuritaires les plus fragiles du monde. Le personnel civil et en uniforme soutient les cessez-le-feu, prévient et répond à la violence, enquête sur les violations et abus des droits de l'homme et aide à construire la paix, le relèvement et le développement dans de nombreux pays touchés par des conflits.
La Journée internationale des Casques bleus des Nations Unies est l'occasion de reconnaître le service et le sacrifice de plus d'un million de personnes qui ont servi sous le drapeau bleu depuis 1948. Et c'est aussi l'occasion d'honorer la mémoire des plus de 4 000 Casques bleus qui ont perdu leur vie au service de la paix.
Sur ce, je vais donner la parole à mon collègue militaire pour un point sur la situation militaire, il est à Goma. Major Alao Salou, nous vous écoutons.
Bureau d’information publique militaire de la MONUSCO [Major Abdouli Bariou Alao Salou] : Au cours des deux dernières semaines, la Force de la MONUSCO, dans la quête de remplir son mandat, a continué à mener de nombreuses activités opérationnelles, notamment des patrouilles de jour et de nuit, des patrouilles de longue portée, des reconnaissances aériennes, des patrouilles conjointes et des escortes.
Ces différentes actions ont toujours été orientées vers l’objectif principal qui est la protection des civils, le soutien aux institutions de la RDC. En outre, la Force de la MONUSCO assiste également de manière constante les FARDC en matière de soutien logistique, de renseignement, d'orientation opérationnelle, de soutien médical et de partage d'informations sur l'évacuation des blessés, de formation dans le but de renforcer les relations avec les FARDC.
Il faut retenir que ces missions sont appliquées autour généralement de la neutralisation des milices ou groupes armés, leur interdit la libre circulation et le libre mouvement et ça finit par la protections des civils.
Quelques actions qui ont été menées durant les deux dernières semaines :
Le service de Génie de la Force a utilisé ses ressources techniques pour participer à divers projets de soutien à la population, en étroite collaboration avec le gouvernement local de la RDC. Par exemple, la route Katoto-Lita-Luna-Djilli, d’une distance de 12 km, vient d'être achevée et remise officiellement au vice-gouverneur de la province de l'Ituri, le 20 avril 2022.
En Ituri, le 24 avril 2022, la Force opérationnelle de la MONUSCO composée de casques bleus népalais, guatémaltèques et bangladais a mené des activités opérationnelles dans la zone de Sake pour neutraliser les éléments de la milice CODECO. L'opération a été exécutée avec succès et a ainsi permis d’expulser la milice de la zone.
Au Nord-Kivu, la situation sécuritaire est restée instable ces deux dernières semaines. Quelque fois, les conditions de sécurité s'améliorent. Une accalmie relative est observée en raison de l'arrêt des affrontements entre le M23 et les FARDC. Les populations ont commencé par rentrer chez elles notamment dans les régions de Ivo, Tchengegerero, Bunagana et Kabino. Par ailleurs, la Force de la MONUSCO continue de lancer une série d'activités opérationnelles pour assurer la protection des civils.
Au Sud-Kivu, la sécurité demeure préoccupante. Cependant, la Force de la MONUSCO en coordination avec les FARDC entreprend une action décisive contre les groupes armés. A titre d’exemple, le 30 avril 22, sous la pression de nos forces, trois militants présumés de groupes armés se sont rendus avec leurs armes individuelles et leurs munitions. Ces suspects ont été recueillis par la Force de la MONUSCO et remis à la structure compétente chargée du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration.
Au total, l’intensification des patrouilles de la Force MONUSCO et l’augmentation du nombre des opérations a permis de réduire les attaques des groupes armés au cours de ces deux dernières semaines, et donc de protéger les populations déplacées. En ce moment, dans tous les secteurs les éléments de la Force restent vigilants et s'acquittent de leurs missions pour assurer la protection des populations. Je vous remercie.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Merci beaucoup. Nous allons maintenant sonner la parole à notre invité Dr Amédée Prosper Djiguimde, qui est donc chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC.
Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC [Dr Amédée Prosper Djiguimde] : Merci à tous les auditeurs de Radio Okapi que je salue au passage. Je voudrais saisir l’opportunité qui nous est offerte ce matin pour notre participation à cette conférence bimensuelle de presse pour aborder deux point essentiels qui ne sont pas de moindre. C’est notamment la Journée mondiale de la santé qui, pour des raisons de contrainte de calendrier, ne nous ont pas permis à bonne date de le faire le 7 avril et éventuellement, la maladie à virus Ebola dont la 14e épidémie vient d’être déclarée le 21 avril dans la province de l’Equateur.
Pour ce qui concerne la Journée mondiale de la santé, qui est célébrée chaque 7 avril de l’année, il faut savoir que c’est une date qui est retenue parce qu’elle correspond à l’entrée en vigueur le 7 avril 1948 de la constitution de l’Organisation mondiale de la santé.
Et pour cette année, le thème qui a été choisie c’est « Notre planète. Notre santé ». Une journée à travers laquelle, l’OMS voudrait attirer l’attention des Etats-membres de cette organisation, et notamment de la communauté internationale sur les actions urgentes à prendre pour préserver notre planète de tout ce qui est pathologies, de tout ce qui est maladies non transmissibles, et tout ce qui est maladies émergentes.
Et les chiffres sont assez éloquents. Quand vous regardez le nombre de personnes qui décèdent de cancer aujourd’hui, quand vous regardez le nombre de personnes qui décèdent de pathologies cardiaques, quand vous voyez le nombre de personnes qui décèdent des maladies liées aux effets néfastes du changement climatique, nous devons ensemble voir quelles sont les stratégies à développer pour que rapidement des actions collectives et innovantes pour préserver la planète et garantir un avenir à nos populations.
Et à titre d’illustration, je voudrais simplement rappeler que quand vous regardez les statistiques produites par l’OMS ces dernières années, on note qu’environ 13 millions de personnes décèdent dans le monde et cela est lié malheureusement à des causes environnementales qui sont évitables. Evitables parce que l’action de l’homme pourrait éviter ces décès-là.
Ensuite, chose importante à souligner, c’est la migration aujourd’hui des moustiques qui se déplacent de plus en plus loin et qui malheureusement transmettent et qui propagent beaucoup de pathologies à travers le monde. Ce qui est dommage, c’est qu’à cela s’associe la pollution des océans avec tout ce que nous avons comme déchets plastiques et l’action de l’être humain encore sur la déforestation, ce qui constitue véritablement des effets qui contribuent malheureusement à faire en sorte que des pathologies deviennent de plus en plus émergentes.
Je voudrais également à titre d’illustration rappeler aussi que la pollution de l’air tue environ 13 millions de personnes chaque année. Des personnes qui meurent soit de cancer de poumon, soit des maladies cardiaques, soit d’accidents vasculaires cérébraux, et j’en passe. Et en faisant l’auscultation, vous vous rendrez compte que 9 personnes sur 10 respirent l’air pollué.
Et malheureusement tout cela a pour conséquence : une émergence de certaines pathologies inondant les formations sanitaires et compliquant en fait la marche vers la couverture sanitaire universelle qui reste un des piliers fondamentaux sur lesquels les Etats ont pris des actions et ont pris des engagements pour qu’à l’horizon de 2030, nous puissions amorcer des progrès.
Autre chose qui est importante, c’est la question du tabac. Les dernières statistiques montrent qu’environ 600 millions d’arbres sont détruits chaque année pour produire environ 6 000 milliards de cigarettes. Et cela a pour conséquence : une augmentation également de cancer de poumon quand vous savez que le tabac est un facteur cancérigène et malheureusement, nous avons 8 millions de personnes qui meurent chaque année pour des cas de cancer du poumon.
Donc, au regard de tout cela, ajouté également au manque d’eau potable, dont environ 900 millions de personnes sont privés chaque année, avec une émergence des maladies diarrhéiques, vous vous rendez compte qu’il est plus urgent que la planète tout entière s’organise pour que nous puissions relever le défi qui est de faire en sorte que notre planète soit préservée de toutes ces conséquences.
Pour ce qui du deuxième point concernant la maladie à virus Ebola, il est important de rappeler que depuis 1976, la première épidémie de maladie à virus Ebola a été déclarée en RDC. Nous sommes à la 14e épidémie qui malheureusement est survenue à l’Equateur, plus précisément dans la ville de Mbandaka.
Et aujourd’hui, à l’heure où je vous parle, nous avons enregistré deux cas avec malheureusement un taux de létalité de 100 %, c’est pour dire que toutes les deux personnes dont le virus a été confirmé sont malheureusement décédées.
Et la stratégie que le gouvernement a déployée avec notre accompagnement, c’est de faire en sorte d’identifier très rapidement toutes les personnes qui ont été en contact avec ces malades décédées. Et nous sommes aujourd’hui à 376 contacts qui ont été identifiés et pour lesquels une surveillance très rapprochée et rigoureuse est opérée depuis le début de l’épidémie.
Fort heureusement nous avons beaucoup d’arsenaux dans la riposte. Nous avons actuellement le travail remarquable qui a été fait par les chercheurs congolais, notamment l’INRB, nous avons la médication qui permet en tout cas d’assurer le traitement curatif pour éviter que les malades puissent aller dans des complications.
Et deuxièmement, il y a la stratégie vaccinale avec un vaccin efficace qui est homologué, qui est également déployé sur le terrain et je peux vous assurer que déjà nous sommes à environ 63 % de couverture des sujets contacts, environ 281 personnes qui sont vaccinées aussi bien des contacts que des contacts des contacts et également aussi du personnel de santé de première ligne pour éviter la propagation de la maladie.
Et donc toutes nos équipes, notamment l’Organisation mondiale de la santé et les autres partenaires qui sont sur le terrain, travaillent en synergie avec l’ensemble des équipes provinciales du ministère de la Santé pour pouvoir endiguer rapidement ce phénomène qui pour le moment reste sous contrôle.
Et nous espérons que nous allons pouvoir contenir cette épidémie de façon efficace. Merci.
Question 1
Saint Germain Ebengo/ Letonnere.info : Dans vos propos liminaires, vous avez parlé des déchets plastiques comme étant parmi les agents vecteurs de pas mal de pathologies à travers les moustiques comme agents transmetteurs. Il n’y a pas longtemps, le chef de l’Etat venait d’inaugurer une usine de recyclage des déchets plastiques pour une raison : de rendre Kinshasa propre et de réduire la pauvreté. Quelle serait la part de l’OMS dans ce projet ?
Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC [Dr Amédée Prosper Djiguimde] : Merci beaucoup. Je pense qu’un projet comme celui que vous venez d’évoquer est véritablement un projet salvateur que nous soutenons, au regard véritablement déjà du fait que cela va générer de l’emploi.
Et deuxième aspect, cela va également réduire les risques de stagnation de ces déchets, et surtout son utilisation et diminuer encore tout ce qu’il y a comme pollution. Je crois que cela va contribuer à réduire de façon drastique certaines pathologiques émergentes telles que les maladies liées en tout cas aux déchets plastiques.
Question 2
André Kitenge/ Radio Okapi (Beni) : Ma question est adressée au porte-parole de la Mission. Monsieur, vous avez parlé de Nairobi, vous avez dit que les Nations Unies prônent un dialogue continu. J’aimerais savoir par rapport aux pourparlers de Nairobi, est-ce que la MONUSCO est-elle impliquée d’une manière ou d’une autre dans ces pourparlers entre le gouvernement congolais et les différents groupes armés qui écument surtout à l’est du pays ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Jusqu’à maintenant, la MONUSCO a fourni un soutien logistique au transport aux représentants des groupes armés qui ont été choisis ou désignés par la facilitation kenyane ou le gouvernement de la RDC. Nous les avons amenés à Goma et de Goma, ils ont été acheminés à Nairobi par le gouvernement kenyan.
Nous avons aussi, par le biais du Bureau de l’Envoyé spécial pour la Région des Grands lacs, dont le mandat couvre justement toutes les dynamiques régionales, nous avons également soutenu les consultations par des services d’interprétation, et nous avons été observateurs, c’est-à-dire nous avons été invités à assister aux consultations.
La MONUSCO et ce Bureau de l’Envoyé spécial pour la Région des Grands lacs continuent d’être prêts à soutenir autant que possible la facilitation kenyane et la délégation congolaise qui mènent ces consultations, selon les besoins que ces dernières exprimeront pour la suite de ce processus.
Question 3
Papy Okito/ Echo d’opinion (Goma) : Ma question, je la pose au responsable de l’OMS. Au moment où tous les pays déclarent peut-être la fin de la Covid, vous, vous nous amenez encore le problème d’Ebola ici au Congo. Et c’est chaque fois qu’une épidémie se termine, une autre revient. Cela fait dix fois notamment à l’est ou à l’ouest. Quelle est le problème notamment avec la République démocratique du Congo sur ce virus ?
Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC [Dr Amédée Prosper Djiguimde] : Merci beaucoup pour votre question passionnante. Je voudrais dire que nous n’avons pas encore fini avec la pandémie de Covid-19, ça il faut le rappeler. Nous sommes toujours dans la riposte. C’est vrai qu’il y a eu une amélioration sur le plan épidémiologique. Il y a eu une grosse amélioration, mais nous devons toujours rester sur nos gardes. Quand nous regardons ce qui se passe actuellement en Chine, il y a beaucoup de variants, il y a des mutations, et nous devons toujours nous préserver en nous faisant vacciner, et en observant tours les mesures barrières comme on l’a toujours fait.
Mais là pour ce qui est de Ebola, c’est vrai que ça peut paraitre assez difficile à comprendre - mais n’oublions pas que la RDC dans son ensemble comporte un écosystème qui est malheureusement favorable à la circulation de ce virus. Et pour les premiers cas, la transmission, c’était le zoonose, c’est de l’animal à l’homme. Et après, il y a des survivants de la maladie qui malheureusement peuvent garder le virus pendant cinq à sept ans. Et au détour de certaines situations, ce virus peut encore revenir à la surface. Malheureusement, ce que nous sommes en train de vivre actuellement à Mbandaka n’a pas de lien avec les autres épidémies.
Donc, je crois que ce n’est pas un fait, une situation qui a été inventée, c’est une situation réelle, liée à beaucoup de phénomènes. Et je crois qu’il est important que nous puissions saluer ici, à travers notre message, les autorités congolaises et pour la réactivité avec laquelle ce diagnostic a été fait pour que l’Etat puisse déclarer cette épidémie et pour que nous puissions la contenir le plus rapidement possible.
Cela veut dire que les équipes ont appris beaucoup de choses de cette épidémie, elles sont réactives, elles sont capacitées. Et vous n’allez trouver nulle part ailleurs dans le monde autant d’experts dans la lutte contre Ebola dans la rue qu’en RDC. Et ça, je crois que c’est un aspect qu’il faudrait qu’on salue et au niveau de l’OMS, nous ne faisons que soutenir les efforts et nous espérons bien que tout ce qui est mis en œuvre va nous permettre de contenir cela.
Question 4
Francis Otshudi/ Journaldesnations.net : Une question pour Mathias. Il y a quelques jours, un responsable au sein d’une plateforme d’une organisation de la société civile, qui intervient dans le secteur minier, je vais citer Elie Kadima, a accusé un membre de la MONUSCO de vouloir manipuler certaines personnes au sein de cette société civile pour qu’il arrive à retirer sa signature qu’il a déposé dans l’accord entre la RDC et le groupe. Ma question est : qu’est-ce que la MONUSCO a à voir dans un accord signé entre un particulier et la République démocratique du Congo pour qu’on soupçonne un membre de la MONUSCO de vouloir manipuler l’opinion pour que cet accord-là ait un problème ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Je suis désolé, je n’ai absolument aucune idée de ce dont vous parlez mais ce que je peux vous dire, c’est qu’il n’y a aucune raison que quelqu’un de la MONUSCO signe ce type d’accord, soit impliqué dans ce type d’accord. Nous travaillons ici au service des autorités ; s’il y a des problèmes privés entre des membres de la MONUSCO et des associations ou entreprises congolaises, il y a des canaux juridiques qui sont là pour répondre aux éventuelles inquiétudes.
Mais je me permets aussi de mettre en garde sur l’amalgame qui est fait parfois entre des affaires individuelles et le fait que certains individus travaillent pour la MONUSCO et ont des problèmes dans leur vie privée. Le fait qu’ils travaillent pour la MONUSCO ne doit pas interférer, ne doit pas en faire un sujet de désinformation concernant la Mission.
Nous avons des structures extrêmement solides et réactives concernant les problèmes de conduite et discipline et j’encourage tout le monde qui a besoin d’avoir recours à ces structures à se manifester auprès de nous pour qu’on puisse régler la situation.
Question 5
Séraphin Nkiere May/ Agence congolaise de presse : Je voudrais poser une question au Docteur et éventuellement aussi au porte-parole, si vous le permettez. Docteur, depuis 1976, il y a cette épidémie qui s’appelle Yambuku, c’était toujours dans l’Equateur. Les choses semblent avoir évolué mais j’ai l’impression que la science ne suit pas parce que depuis l’épidémie de Yambuku, la science n’a pas suivi, et que chaque année, toujours à l’Equateur, cette épidémie d’Ebola émerge. Alors je ne comprends pas : qu’est-ce que la science attend pour enrayer une fois pour toute Ebola ?
Monsieur Mathias, s’il vous plait. Le 6 mai, il y aura des élections pour les gouverneurs. Je voulais savoir si la MONUSCO a pris quelques dispositions pour éviter des dérapages parce que j’ai l’impression qu’un homme comme Muanda Nsemi a été accueilli avec triomphe au Kongo central – ça risque de poser des problèmes de sécurité. Vous avez pris certaines dispositions ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Je vais commencer parce que ma réponse sera plus courte. Vous le savez, nous ne sommes pas présents au Kongo central, nous ne sommes pas présents dans la grande majorité des provinces de la RDC. Nous avons maintenant une présence militaire permanente au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et en Ituri.
Nous suivons évidemment ces élections avec attention et nous espérons qu’elles se passeront de la manière la plus pacifique possible. Nous n’avons pas pris de dispositions dans des provinces où nous ne sommes plus présents. Il faut bien comprendre que la MONUSCO d’il y a 20 ans, qui était partout au Congo, c’est la MONUSCO du passé.
Aujourd’hui, nos efforts sont concentrés aux endroits où il y a des groupes armés et où il y a une menace sécuritaire qu’il ne nous semble pas possible à gérer par les forces de sécurité nationales seulement. Mais dans le reste du pays, c’est évidemment la Police nationale congolaise qui est responsable du maintien de l’ordre et du bon déroulement de ces processus électoraux.
Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC [Dr Amédée Prosper Djiguimde] : Concernant la question qui a été posée sur les avancées en matière de lutte contre la maladie à virus Ebola, je voudrais saisir cette opportunité pour saluer tout le travail de recherche qui a été fait depuis lors. Quand vous regardez depuis 1976 jusqu’à maintenant, il y a d’abord beaucoup d’avancées dans la compréhension de la chaîne épidémiologique de la maladie à virus Ebola – comment cette épidémie se propage, comment la maladie se transmet-elle… Je crois qu’il y a eu beaucoup d’avancées qui ont permis aujourd’hui de mieux orienter les stratégies de lutte contre cette maladie.
Le deuxième aspect que je voudrais soulever, quand vous prenez de 1976 à maintenant, grâce aux efforts de la science, et des chercheurs congolais notamment, nous avons aujourd’hui des molécules qui permettent d’assurer un traitement de la maladie. Je pense qu’il s’agit d’une avancée significative qui n’existait pas par le passé.
Troisième élément : c’est la recherche vaccinale qui a été amorcée et qui fait qu’aujourd’hui, nous disposons un vaccin efficace, homologué, et qui permet véritablement d’apporter une certaine immunité aux populations. Il y a plusieurs vaccins qui existent.
Et le quatrième élément qui existe aujourd’hui : toutes les équipes de recherche et les actions qui sont en cours visent à voir comment la chaîne de transmission peut être déjà annihilée et réduite au niveau des animaux. Il y a beaucoup d’activités de recherche, il y a beaucoup d’activités scientifiques qui se mènent à ce niveau parce que comme je l’ai dit, c’est une transmission zoonotique et qui méritent véritablement que nous puissions avoir des efforts concentrés sur tout ce qui est faune sauvage et voir quelles sont les actions correctes. Il y a beaucoup d’actions qui sont en train d’être faites dans ce sens-là.
C’est vrai qu’on ne croirait pas que quelque chose se passe, au regard du fait que chaque année, ce sont des épidémies, mais l’élément fondamental qu’il faut saluer, c’est le progrès qui se fait dans la confirmation des cas. Avant, un cas pouvait évoluer jusqu’à contaminer plusieurs personnes sans qu’on le sache mais aujourd’hui, avec la réactivité, avec la capacitation des personnels et des plateaux techniques, nous sommes en mesure, dès qu’il y a une situation de suspicion, en quelques heures, la confirmation est faite par le laboratoire de référence, qui est à l’INRB, et ça nous permet également d’aller rapidement dans l’action.
Donc je crois que ça, c’est autant d’efforts qui ont été faits depuis 1976 qu’il faut saluer et qui vont certainement se poursuivre, sous le leadership du gouvernement, avec l’accompagnement des différents partenaires.
Question 6
Sharif Ali Bitum/ Radio Canal Révélation (Bunia) : J’ai une question par rapport à la fermeture de la base de la MONUSCO d’Aveba, dans la chefferie de Walendu Bindi. J’aimerais savoir justement pourquoi la MONUSCO a décidé de fermer cette base ? Pourtant, elle servait la population dans le cadre sécuritaire, surtout que la région reste sous l’emprise de la milice FRPI. C’est ça la première question.
La deuxième question, c’est pour l’invité, par rapport à l’amélioration de COVID19. Est-ce que vous ne trouvez pas qu’il est temps de laisser vivre la population et de ne pas la pousser à vivre sous cette emprise psychologique de cette pandémie puisque pour l’instant, nous voyons que tout le monde ne porte plus de masques (cas concret, même dans la salle), ça prouve qu’il y a amélioration comme vous l’avez dit.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Sur la première question : la MONUSCO a un ensemble de bases qui sont plus ou moins, on va dire, permanentes, et un ensemble de bases qui sont déployées selon une menace qui est évaluée, et qui est évaluée aussi avec les autorités provinciales et les acteurs congolais.
Il arrive souvent que quand notre base est là, on nous pose la question : la population souhaite que vous partiez. Et dès qu’on ferme la base, soudainement, c’est le message inverse qui nous est transmis. Bon, ça, c’est un point.
Nous, on essaye d’être au plus près de la menace la plus importante. Il y a, vous le savez, notamment dans les territoires de Djugu et Mahagi, des situations extrêmement complexes, extrêmement difficiles, qui nous obligent à remobiliser, en tout cas à mobiliser des militaires sur de nouvelles bases qui sont déployées au plus près des populations qui en ont le plus besoin.
Sur la base d’une évaluation qui est faite avec vos forces de sécurité nationales, qui est faite aussi selon le déploiement de forces de sécurité nationales dans une zone donnée, on décide qu’à un moment donné, on peut fermer cette base. Mais il faut savoir que nous avons énormément travaillé à améliorer notre flexibilité, notre réactivité : si une menace particulière venait à se déclarer à Aveba, ou ailleurs où nous ne sommes pas déployés, à ce moment-là, évidemment, on considérerait un redéploiement.
Ce n’est pas une décision définitive, c’est une décision basée sur l’évaluation qu’on a fait avec vos forces de sécurité nationales et la nécessaire priorisation d’où nous nous déployons compte tenu des multiples menaces qui, vous le savez, existent notamment en territoire d’Irumu et de Djugu, dans votre province de l’Ituri.
Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC [Dr Amédée Prosper Djiguimde] : Merci beaucoup. Je pense que c’est vrai la Covid-19 nous a appris beaucoup de choses et nous apprenons toujours. Et surtout que les contraintes auxquelles nous sommes tous soumis nous permettent véritablement de pouvoir espérer que les choses puissent aller en s’améliorant. Je pense qu’il est important que nous puissions, malgré les préoccupations que nous avons tous, toujours garder la dynamique et garder une bonne posture pour faire face à cette pandémie qui, je vous le rappelle, a fait beaucoup de millions de décès. Et fort heureusement aujourd’hui, nous avons des arsenaux qui nous permettent de pourvoir faire face à cette pandémie.
Si nous voulons avoir encore une meilleure liberté dans nos mouvements et dans certaines actions, il faut que nous renforcions notre immunité à travers la vaccination. Vous savez que la RDC est un des pays prioritaires au niveau de l’Afrique sub-saharienne et à cause de son potentiel démographique. Et la communauté internationale tout entière s’est mobilisée et se mobilise toujours pour fournir le maximum de vaccins à la RDC.
Il y a plusieurs campagnes qui sont en cours et qui ont été initiées depuis le 19 avril 2021. Je crois que je voudrais saisir cette opportunité pour inviter les uns, les autres à se faire vacciner. C’est une vaccination qui est gratuite.
Et toujours maintenir le cap avec le respect des mesures barrières tel que le Gouvernement l’a si bien édicté. Je crois que cela va nous permettre d’arriver à un moment où véritablement le risque va être quasiment nul et nous allons retrouver encore une vie normale. Mais pour l’heure, le conseil et l’invitation, c’est de faire en sorte que nous puissions garder la dynamique parce que la pandémie n’est pas encore derrière nous. Si ailleurs les gens pensent cela, il faut faire attention quand on regarde ce qui se passe en Chine. C’est évocateur.
Donc, faites-vous vacciner. Invitez vos voisins et amis à se faire vacciner. Le vaccin est disponible et il est gratuit partout en RDC. Ceux qui ont des difficultés pour y accéder doivent se faire signaler et le vaccin va leur être admis.
Question 7
Alain Wandimoyi/ Presse Hebdo (Goma) : Moi je reviens sur Nairobi où il y a des pourparlers. C’est depuis des années que la MONUSCO accompagne le Gouvernement congolais et les mêmes problèmes surgissent. La MONUSCO ne conseille pas son partenaire par rapport à des ratés des pourparlers ? La MONUSCO n’arrive-t-elle pas à dire au Gouvernement de pouvoir changer de stratégie puisqu’apparemment, certains de ces acteurs de ces groupes armés n’étaient pas dans les pourparlers alors que la guerre continue à l’Est. Qu’est-ce qu’on peut attendre de la MONUSCO autour de cette question comme elle est positionnée ici dans la province où il y a trop de problèmes sécuritaires ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Merci pour votre question. Je pense que tout le monde se rend bien compte que ce n’est pas la première fois qu’il y a des processus de dialogue qui sont lancés avec les groupes armés et qu’effectivement, cela n’a pas réussi à régler le problème de manière définitive.
Mais pour nous ce qui est important, ce qu’il y a des efforts dans le cadre de l’intégration de la RDC dans la Communauté de l’Afrique de l’Est, il y a des efforts qui sont entrepris au niveau régional et sous la facilitation du président Kenyatta. Ces efforts-là, nous les saluons parce que cette dimension régionale est une dimension fondamentale pour régler les problèmes de fond liés à la violence armée à l’Est.
Ce processus de Nairobi vient juste de commencer et pour nous c’est une opportunité qui enlève aussi toute excuse aux groupes armés pour ne pas désarmer car ce sont des consultations auxquelles des représentants des groupes armés sont invités. Encore une fois, ce n’est pas nous qui décidons qui est invité. C’est la facilitation kényane et le Gouvernement congolais.
Mais nous pensons que des consultations qui continuent avec ces représentants des groupes armés et aussi avec les victimes et les représentants des communautés peuvent permettre d’appuyer la stratégie nationale de désarmement et de réintégration communautaire et peuvent permettre de nourrir ce processus de réintégration communautaire pour trouver des solutions à long terme qui vont encore une fois, comme on le répète souvent, au-delà de la réponse militaire.
La réponse militaire, évidemment, est fondamentale, est nécessaire contre les groupes armés. Mais il faut aussi, je le répète souvent, s’attaquer aux causes profondes du conflit, s’attaquer à toutes les questions qui font que des communautés n’arrivent pas à cohabiter de manière pacifique. Et tous ces problèmes d’accès aux ressources, d’accès à la terre et de règlement pacifique des conflits, c’est quelque chose qui peut aussi être réglé, en tout cas, aider à trouver des solutions communes, dans le cadre du programme de DDRCS. Ces consultations de Nairobi nous semblent une opportunité à saisir pour travailler à tout cela.
Question 8
Violette Nseya/ Radio Héritage : Une question pour le docteur. ‘’Notre planète, notre santé’’, ce thème ne s’accommode pas vraiment avec la vie environnementale de la République démocratique du Congo. Alors, la question est de savoir : est-ce que l‘OMS réfléchit ou a déjà réfléchi sur le comment aider la RDC à avoir un environnement sain bien que la responsabilité soit partagée, bien sûr ?
Chargé de Bureau de l’Organisation mondiale de la Santé en RDC [Dr Amédée Prosper Djiguimde] : Je voudrais vous rassurer que nous accompagnons actuellement le Gouvernement de la République démocratique du Congo, surtout, pour avoir une stratégie du secteur santé pour faire face au changement climatique. Je crois que notre contribution avec les autres secteurs, bien sûr environnement et tout cela, vise à parer, réduire notamment les effets néfastes de tout ce qu’il y a comme changement climatique et les comportements néfastes sur l’environnement, avec les conséquences sur les maladies émergentes dont je viens de parler.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : C’est tout le temps dont disposons aujourd‘hui. Dans deux semaines et merci aux auditeurs de Radio Okapi ! Bonne continuation et bonne journée !