Transcription de la conférence de presse ONE UN du 5 mai 2021
La conférence de presse de ce jour reçoit Mme Katya Marino, Représentante adjointe de l’UNICEF, comme invitée spéciale.
La conférence de presse des Nations Unies était animée à partir de Kinshasa par Mathias Gillmann, porte-parole de la MONUSCO et coordonnateur du Groupe de communication des Nations Unies.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Bonjour à tous, merci aux auditeurs de Radio Okapi et bienvenue dans cette nouvelle conférence de presse des Nations Unies en République démocratique du Congo.
Aujourd’hui, j’ai le plaisir de recevoir Katya Marino, qui est Représentante adjointe de l’UNICEF. Nous sommes également connectés avec mes collègues militaires et des journalistes à Goma et Beni.
La Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo et Cheffe de la MONUSCO, Bintou Keita, a rencontré hier après-midi le Président Felix Tshisekedi pour évoquer la déclaration d’état de siège qui entre en vigueur le 6 mai, donc demain, dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri.
Cette décision est une décision souveraine qui peut avoir des implications significatives en matière d’assistance humanitaire et de droits de l’homme. La MONUSCO, avec les Agences des Nations Unies, va étudier l’ordonnance en profondeur et fera part aux autorités, en temps opportun et de manière constructive, de ses observations.
La discussion entre le Chef de l’Etat et la Représentante spéciale a porté sur les attentes des autorités en matière de soutien de la part de la MONUSCO afin de restaurer la sécurité dans les deux provinces, ainsi que sur la nécessité de protéger les droits fondamentaux des populations dans la mise en œuvre de l’état de siège.
La MONUSCO prend note du fait que l’état de siège est déclaré pour une période initiale de 30 jours et que son éventuelle prorogation nécessite consultation avec l’Assemblée nationale et le Sénat.
En outre, plus tôt la semaine dernière, la Représentante spéciale a salué l’investiture du gouvernement et réaffirmé la détermination du système des Nations Unies dans son ensemble à soutenir autant que possible les priorités énoncées en matière de sécurité, de renforcement de l’autorité de l’Etat, de promotion des droits de l’homme, d’assistance humanitaire et de développement.
La MONUSCO se félicite en particulier de la détermination exprimée par le Premier ministre de se mettre au travail rapidement, notamment sur des réformes institutionnelles majeures - réforme de la justice et réforme du secteur de la sécurité. Elle se félicite aussi de l’engagement personnel pris par le Premier ministre à donner la priorité au DDRCS et à démarrer un programme concret sur la réintégration des anciens combattants sur une base communautaire. Enfin, la MONUSCO se félicite de l’accent fort mis sur l’Agenda Femmes Paix et Sécurité, notamment en ce qui concerne la représentation des femmes dans les institutions, la protection de l’intégrité physique des femmes et plus largement, la lutte contre les violences sexuelles.
Je voulais également vous signaler que le 3 mai, la MONUSCO a remis 9,000 tests COVID-19 à l’Institut National de Recherche Biomédicale (INRB) à Goma.
En outre plusieurs sections de la MONUSCO du bureau terrain de Goma en collaboration avec le représentant du gouverneur du Nord Kivu ont initié une série de sessions de formation, axées sur le rôle des femmes dans la protection des civils dans le territoire de Nyiragongo. Des formations similaires se poursuivront à Munigi du 6 au 7 mai et à Sake du 11 au 12 mai 2021.
A Goma, le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme a clôturé la semaine dernière une session de formation sur le monitoring des violations de droits de l’homme, en collaboration avec la Coordination Nationale aux Droits de l’Homme (CNDH), représentée par des participants venus de trois provinces, à savoir le Maniema et le Nord et le Sud-Kivu. Les échanges et les discussions ont porté également sur comment multiplier des stratégies sur la protection des sources, la protection des témoins, la protection des victimes, mais aussi la protection des défenseurs des droits de l’homme eux-mêmes.
Au Kasaï, la Police des Nations Unies (UNPOL) a remis trois conteneurs préfabriqués dans le cadre de la lutte contre l’insécurité et le grand banditisme dans la ville de Kananga.
De même, dans le cadre de la mise en œuvre du projet d’appui en matériels bureautiques et informatiques au pool de formateurs de la PNC du Kasaï Central, une cérémonie officielle a été organisée pour la remise d’un lot d’équipement bureautique, informatique et solaire d’une valeur de 10.000 $ a la PNC du Kasaï central.
Enfin, une cellule de détention féminine à l’unité de Police P2 de la ville de Kananga, d’un coût de 9.500 $, a été inaugurée en présence des autorités de la Province.
A Kinshasa, dans le cadre de l’acte d’engagement du Plan d’action triennal de lutte contre les violences sexuelles au sein de la Police Nationale Congolaise, une formation au profit de 40 cadres de commandement a été organisée à Kinshasa avec le Département de Protection de l’Enfant et de Prévention des Violences Sexuelles de la Direction de Sécurité Publique, en concert avec l’Unité Genre de la Police des Nations Unies. Cette formation visait à accélérer la mise en pratique de la politique du Gouvernement de tolérance zéro en matière de violences sexuelles au sein de la Police Nationale Congolaise.
Je donne tout de suite la parole à mon collègue du bureau du porte-parole militaire à Goma pour un point de la situation sécuritaire.
Bureau du porte-parole militaire [Major Mohamed Ouhmmi] : Merci Mathias, bonjour tout le monde. En ce qui concerne les activités de la Force ces deux dernières semaines, la Force a continué de mener des opérations dans ses zones de responsabilité en réagissant énergiquement aux incursions des groupes armés qui se sont récemment avérées en augmentation à divers endroits.
La Force a pu mener au total 4. 266 activités opérationnelles, dont des patrouilles de jour et de nuit, des patrouilles conjointes, des escortes et des reconnaissances aériennes. La Force a continué de travailler en étroite coordination et coopération avec les forces de sécurité de l’État pour assurer la protection des civils.
En outre, la Force a utilisé ses ressources de génie militaire pour participer à divers projets d'appui à la population, en étroite coopération avec le gouvernement local, tels que le renforcement de la route Gina-Fataki (RN-27), l'amélioration d’un pont à Budana, la réfection d'un pont à Sange et la réhabilitation rapide des voies de service à l'aéroport de Bunia. Ces activités témoignent de la détermination et de l'engagement de la MONUSCO envers le peuple de la RDC et le mandat de l'ONU.
Au niveau opérationnel, les unités de la Brigade d'intervention de la Force (FIB) ont continué à mener une action rapide et vigilante, en lançant des forces de réaction rapide dans des zones vulnérables ciblées, pour dissuader les groupes armés et protéger la population. Les autres forces de la MONUSCO ont également mené des opérations conjointes avec les FARDC pour empêcher les incursions ennemies, déjouer les crimes, dominer la zone des opérations et anticiper tout problème de protection des civils. La présence constante des Forces dans les principaux points chauds a assuré la sécurité dans la zone et garanti la liberté de mouvement.
Par exemple, dimanche 25 avril, après avoir été informés d'une attaque de présumés ADF dans le village de Mandumbi, les troupes de la brigade d’intervention ont rapidement déployé des patrouilles aux côtés de leur partenaire FARDC ; cette intervention a limité les dommages qui auraient pu survenir.
De même, dans la nuit du lundi 26 avril, alors qu'ils répondaient à une alerte dans le village de Schubert, sur le territoire de Mahagi, des soldats de la paix du Bangladesh ont ouvert le feu pour repousser une attaque de membres présumés de la milice du CODECO qui venaient de blesser deux civils. Sous la forte présence de la Force de la MONUSCO, les assaillants présumés ont fui le village, où les casques bleus ont patrouillé toute la nuit pour empêcher tout acte de représailles.
Dans le cadre des efforts de collaboration, une réunion de coordination a eu lieu le 28 avril 21, entre le commandant de la Force intérimaire de la MONUSCO et le commandant adjoint des FARDC chargé des opérations. La réunion a porté sur la situation actuelle en matière de sécurité sur le territoire de Beni. Ces réunions garantissent que les opérations conjointes organisées atteignent les objectifs escomptés. La MONUSCO est également en train de construire une base militaire pour les troupes des FARDC à Kididiwe, entre autres, afin de renforcer la présence des troupes congolaises sur ce territoire et de mieux protéger les civils. Cela permettra aux FARDC de mieux s'installer afin de sécuriser les différents emplacements qui bénéficieront d'une telle initiative.
Les actions des Secteurs dans les zones sensibles ont permis de dissuader et atténuer la menace et la violence, tout en assurant la sécurité et la protection des civils. La présence des casques bleus a assuré la protection et la stabilité locales avec des patrouilles de domination robustes, un engagement efficace contre les groupes armés et un soutien constant aux forces de sécurité locales. Les forces de la MONUSCO dans le secteur nord et la FIB, après avoir été ciblées par des groupes armés, ont fermement riposté et ont réussi à repousser les attaques. La Force poursuivra tous ses efforts pour soutenir et promouvoir son mandat pour apporter la stabilité et la paix en RDC.
Enfin, la Force a déployé une unité de combat à Kahololo au Sud-Kivu pour protéger les civils récemment déplacés. Merci pour votre attention.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Avant de donner la parole à notre invitée, je voudrais vous signaler que lundi a été célébrée la Journée internationale de la liberté de la presse. Dans son message pour l’occasion, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a souligné qu’un journalisme libre et indépendant est notre meilleur allié dans la lutte contre les informations fausses et trompeuses. Aujourd’hui, nous célébrons le trentième anniversaire de la Déclaration de Windhoek pour le développement d’une presse africaine libre, indépendante et pluraliste. Bien que les médias aient radicalement changé ces trente dernières années, l’appel urgent lancé dans la Déclaration en faveur de la liberté de la presse et du libre accès à l’information est plus pertinent que jamais.
Enfin, vous avez remarqué que lundi 3 mai a marqué la fin de la 12ème épidémie de la maladie à virus Ebola en République démocratique du Congo (RDC), trois mois seulement après la notification du premier cas au Nord-Kivu. L'épidémie d'Ebola qui a réapparu en février est survenue neuf mois après qu'une autre épidémie dans la même province avait été déclarée terminée.
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) félicite les autorités de la RDC et les agents de santé sur le terrain pour leur réponse rapide qui s’appuie sur l’expérience du pays dans la lutte contre les flambées d’Ebola. Cette épidémie est la quatrième que le pays connaît en moins de trois ans. Onze cas confirmés et un cas probable, six décès et six guérisons ont été enregistrés dans quatre zones de santé du Nord-Kivu depuis le 7 février.
Dans un communiqué, le Coordonnateur humanitaire en RDC, David McLachlan-Karr, a souligné que la fin de l’épidémie signe le début des activités post-Ebola. Un nouveau plan post-Ebola est en cours de finalisation et viendra renforcer le précédent. « Nous espérons que la maladie à virus Ebola ne reviendra plus en RDC mais si c’était le cas, les équipes sur place ont toutes les compétences et les moyens d’y faire face », a déclaré M. McLachlan-Karr.
Je donne maintenant la parole à la Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC, Katya Marino.
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Merci beaucoup Mathias. Bonjour tout le monde. Merci de m’avoir invitée à cette conférence de presse.
Comme vous le savez, depuis le 26 avril, un communiqué est sorti où l’UNICEF condamne l’utilisation et la manipulation des enfants à des fins politiques en République démocratique du Congo.
Le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) plaide pour que le Gouvernement de la République démocratique du Congo prenne des mesures appropriées pour prévenir l’utilisation et la manipulation des enfants à des fins politiques.
L’UNICEF rappelle également à la population que les enfants ne devraient pas être utilisés dans des manifestations « populaires ».
Nous exhortons les leaders des partis politiques partout dans le pays à cesser d’utiliser les enfants en les manipulant de diverses manières.
Ces actes constituent une violation des droits de l’enfant dans la mesure où ils affectent notamment le rythme et la présence des enfants à l’école et peuvent faire courir aux enfants des risques élevés.
L’UNICEF et les acteurs de protection de l’enfance ont en effet été alertés par des incidents affectant des enfants pendant les manifestations dont des blessures par balle, des incarcérations d’enfants et même des décès.
Nous lançons un appel aux autorités et à toutes les forces vives du pays, y compris à la société civile et aux parents, pour qu'ils redoublent d'efforts afin d'appuyer les acteurs de la protection de l'enfance dans leur lutte contre la manipulation des enfants à des fins politiques, manipulation qui les exposent à des risques importants de violences ou d’arrestations en violation des dispositions de la Loi Portant Protection de l’Enfant mais aussi de la Convention de Internationale des Droits de l’Enfant.
L’UNICEF plaide pour l’instauration d’un environnement protecteur qui contribuera à prévenir et à combattre la violence, la maltraitance et l’exploitation des enfants afin d’assurer autant que faire se peut la survie et l’épanouissement de l’enfant, moyennant une tolérance zéro pour toutes les formes de violence à leur égard.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Merci beaucoup Katya, et j’ajoute que la Représentante spéciale, Bintou Keita, réitère son soutien total à cet appel lancé par l’UNICEF concernant l’utilisation et la manipulation des enfants à des fins politiques. Elle rappelle que la protection et l’intérêt des enfants doivent être au cœur de nos préoccupations.
Question 1
Saint-Germain Ebengo/ Patrienews.net : Vous avez déploré la diminution du nombre d’enfants dans les instances scolaires à cause des manipulations politiques. Ça m’ouvre une fenêtre d’opportunité pour connaitre le point de vue de l’UNIECF par rapport à la gratuité présidentielle.
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Merci beaucoup pour la question, question très pertinente. Car la place des enfants justement est à l’école. L’école garantit le développement et forme les citoyens de demain pour un Congo plus fort. Donc, l’UNICEF comme peut-être vous le savez, appuie le gouvernement, en l’occurrence le ministère de l’Education, au niveau national et au niveau provincial dans le programme de gratuité scolaire notamment.
Nous avons, à travers les fonds de différents bailleurs de fonds, déjà construit tout un certain nombre - plus de 500 classes. Et il y en a d’autres qui sont déjà planifiées pour l’année 2021, plus de 500 nouvelles [classes] dans presque toutes les provinces de la RD Congo pour pouvoir bien accueillir ces enfants qui ont rejoint les bancs de l’école grâce à la gratuité.
Comme vous le savez, les classes sont beaucoup engorgées, c’est comme ça que c’est important d’élargir l’espace des écoles avec des classes additionnelles pour pouvoir bien accueillir. Merci.
Question 2
Jephté Kitsita/ 7sur7.cd : Ma question, c’est en rapport avec la proclamation de l’état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Vous l’avez évoqué, vous avez même dit que la Représentante spéciale a rencontré le chef de l’Etat hier. Nous voulons savoir, avec cet état de siège, quel sera le rôle de la MONUSCO dans ces deux provinces, l’Ituri et le Nord-Kivu ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : C’est ce qui a été au cœur de la discussion d’hier avec le président et le soutien de la MONUSCO évidemment continue. Etat de siège ou pas, nous avons un mandat qui est de venir en aide, de soutenir l’armée congolaise, de soutenir la Police nationale congolaise. Et dans l’application de cet état de siège, nous allons être constructifs et nous allons également vigilants à ce que les droits fondamentaux soient respectés.
Nous avons pris note que hier, le porte-parole de l’armée, le major-général Kasonga a pris des engagements dans ce sens. Evidemment, on s’en félicite. Nous continuerons à apporter notre soutien autant que possible à l’armée congolaise. Parce qu’évidemment, il est de l’intérêt de tous que la situation s’améliore dans ces deux provinces en particulier.
Question 3
Jeanne Shabani/ishapi Voice TV (Goma) : Ma question, je la pose au porte-parole militaire. J’aimerais savoir, toujours dans l’angle de l’état de siège, est-ce que la [Force] de la MONUSCO ou la MONUSCO va aider les nouveaux militaires qui vont occuper les postes civils. Et si oui, pendant les opérations, est-ce les journalistes également auront l’accès, comme vous l’avez dit, lors des points de presse passés ?
Bureau du porte-parole militaire [Major Mohamed Ouhmmi] : Merci pour cette question. Comme a dit le porte-parole de la Mission, nous avons un mandat, quelles que soient les circonstances, et parmi les clauses de ce mandat, il y a le soutien aux FARDC. Donc, nous allons continuer toujours à soutenir nos confrères des FARDC dans les opérations qu’ils mènent. C’est ma réponse à cette question. Je ne sais pas si Mathias a des choses à ajouter.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Merci porte-parole militaire. Il est clair que c’est une décision souveraine, c’est une disposition constitutionnelle, c’est une décision qui a été prise par le Président. Donc, évidemment, nous, on se place toujours dans une logique de partenariat et de soutien et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour que ces opérations, ces nouvelles dispositions soient aussi efficaces que possible pour neutraliser les groupes armés.
Avec aussi - à notre sens, c’est important de le rappeler - en plus des opérations militaires, il faut toujours accompagner la restauration de l’Etat pour faire en sorte que les opérations militaires ne soient pas des coups d’épée dans l’eau ou des opérations coup de poing qui permettent des avancées immédiates mais qu’elles soient aussi l’instrument qui permette de ramener l’autorité de l’Etat sur le territoire de la RDC. Car c’est ainsi qu’on va réussir à construire la stabilité à long terme dans ce pays.
Question 4
Kawa Nkoyi/ Radiotélévision Ruwanzuru (Beni) : Au porte-parole de la Mission, nous voulons savoir quelle est la particularité de la mission des troupes kenyanes qui sont annoncées ici à l’Est ? Et à l’UNICEF, ici à Beni, les enfants disent qu’on ne fait que sauver l’année scolaire mais on ne sauve pas l’éducation. Comment l’UNICEF compte accompagner les enfants de Beni ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Je vais commencer si vous voulez bien. Le Kenya effectivement participe à la Brigade d’intervention. Comme vous le savez, le Conseil de sécurité nous a accordé quatre unités de réaction rapide, qui sont des structures qui sont plus flexibles, et à notre sens, plus adaptées à la guerre asymétrique, comme on dit, contre les ADF, compte tenu aussi des contraintes d’accès qui existent dans la région du sud de l’Ituri et du Ruwenzori.
Donc le Kenya, en plus d’autres pays notamment le Népal, fournit une de ses unités de réaction rapide. Et évidemment, c’est un signe de solidarité avec la République démocratique du Congo et avec la MONUSCO, avec ce qu’on essaie de faire dans ce pays. Je laisse à Katya le soin de répondre sur l’éducation.
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Je dirais que les enfants voient toujours un peu plus loin, c’est très bien ça. Parce qu’effectivement à court terme, pour cette année scolaire, c’est impératif d’essayer de la porter à terme. On est au dernier trimestre, il faut que les enfants qui doivent faire les examens, fassent leur TENAFET, qu’on progresse. Parce que l’accès à l’éducation, ce n’est pas seulement être enregistré à l’école mais aussi fréquenter et terminer l’année scolaire. Ça, c’est très important, ça, c’est le premier pas.
Mais à long terme : nous nous n’avons jamais cessé, et ce n’est même pas seulement l’UNICEF, mais les autres agences des Nations Unies et la plus connue aussi pour l’éducation, c’est sans doute l’UNESCO - nous avons toujours appuyé les autorités, comme je le disais tout à l’heure, nationales et provinciales. J’ai cité : la réhabilitation des salles classes additionnelles ; je peux citer l’accompagnement dans le renforcement des capacités des enseignements ; l’équipement et les fournitures scolaires pour les enfants, pour les enseignants ; des formations sur les violences basées sur le genre dans les écoles, etc.
Donc, il y a toute une série de mesures et d’activités qui se font à différents niveaux, et jusque même avec les comités des parents d’élèves pour les sensibiliser à l’importance de l’éducation des enfants et des filles pour qu’ils soutiennent les efforts nationaux pour, comme disent les enfants, essayer de sauver l’éducation. Merci.
Question 5
Fabrice Lukamba/ Liberteplus.net : Je m’adresse à Mme Katya. Pas plus tard que la fois passée, nous avons appris que certains enfants qui manifestaient notamment à Beni, pour réclamer la paix dans cette partie du pays, étaient interpellés, quelle est la réaction de l’UNICEF ?
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Vous l’avez entendu aussi dans le communiqué tout à l’heure, la tolérance contre n’importe quelle violence faite aux enfants reste zéro. Les droits des enfants, c’est notre première préoccupation à l’UNICEF, que les droits des enfants soient respectés. Et nous continuons, nous avons fait un plaidoyer avec le cluster Protection de l’enfance pour continuer le monitoring et la documentation des incidents commis à l’égard des enfants. Et nous avons aussi entamé un dialogue avec les autorités politiques et les forces de sécurité pour que les principes de protection de l’enfance soient respectés.
On a tout un réseau d’assistants sociaux et de communautés protectrices des enfants, on a aussi sensibilisé ces instances à la protection de l’enfance. Et on le disait tout à l’heure, la place des enfants est à l’école et si les enfants sont à l’école et pas ailleurs, nous ne nous trouverons pas en pareille situation.
Question 6
Venant Vudisa/ RTNC : Ma question s’adresse à Madame de l’UNICEF. Après vos enquêtes minutieuses, êtes-vous arrivée à déterminer que ce sont des politiciens qui sont à la base, qui utilisent des enfants à des fins politiques, ou c’est peut-être eux-mêmes les enfants qui s’y intéressent ? Est-ce que vous avez des preuves que ce sont des politiciens qui les utilisent ou il va de l’intérêt des enfants de s’immiscer dans des situations politiques afin de gagner quelque chose ? Merci.
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Cher Monsieur, merci pour la question. Moi, j’ai des preuves que les enfants ne sont pas à l’école. Ça, je peux vous rassurer, ils ne sont pas là, et c’est là qu’ils devraient être.
Et nous avons reçu des données, toujours par le cluster de la Protection de l’enfance, par rapport à des enfants blessés par balles (7 enfants), incarcérés (117), décès d’enfant (1) et des bâtiments et infrastructures incendiées (17).
Ça, ce sont les données que j’ai, avec des écoles fermées et de l’absentéisme qui sans doute, à la fin, provoquent la déperdition scolaire. C’est ça, vraiment, les données qu’on a.
Question 7
Sébastien Musayi/ Afrik Images (Beni) : Ma question s’adresse au porte-parole militaire. Pendant que les massacres de la population civile existent encore dans la région de Beni, pensez-vous que la construction de la base militaire à Kididiwe était une priorité pour la protection de la population civile et la restauration de la paix dans ce coin de Beni ?
Bureau du porte-parole militaire [Major Mohamed Ouhmmi] : Merci pour votre question. La construction d’une base militaire pour les FARDC est toujours utile parce qu’ils vont s’installer, ils vont avoir un pied sur le terrain, ils auront une base arrière, là où ils ont la possibilité de faire leurs activités qui sont pré-opérationnelles, bien sûr.
Donc la construction d’une base est toujours utile pour les FARDC, parce que cette base était l’ancien… je crois, était occupée par les rebelles. La construction d’une base est toujours utile pour une armée. Ça lui permet d’avoir une assise pour déposer sa logistique. Merci.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Absolument, merci pour cette réponse. J’ajouterais, pour une perspective un peu historique, que les opérations militaires contre les ADF ont souvent permis de déloger les ADF, mais qu’ensuite, c’est justement l’incapacité de l’armée congolaise à tenir ses positions qui a permis aux ADF de se regrouper et de recréer leur réseau.
C’est pour ça qu’il est absolument impératif – comme l’a expliqué mon collègue militaire – d’asseoir la présence des autorités de l’Etat, et notamment des FARDC, dans ces zones, afin de prévenir un éventuel regroupement ou une éventuelle reconstitution des ADF de manière plus permanente.
Et il semble que cette base réponde à un besoin des FARDC -puisque ce n’est pas nous qui avons décidé unilatéralement où nous installer, c’est évidemment un dialogue et une coopération avec l’armée congolaise – qui permet d’être présent et d’apporter le soutien qu’eux-mêmes réclament.
Question 8
Jacques Kibuika/ Emmanuel TV (Goma) : Ma question est adressée au porte-parole militaire. Aujourd’hui, la Mission des Nations Unies, la MONUSCO, est au Congo pour la protection des civils. Mais il y a l’Etat congolais qui fait recours à un autre pays, presque pour la même mission, pour venir combattre et protéger les civils. Est-ce un aveu d’échec ou si tel est le cas, est-ce que vous pouvez nous dire aujourd’hui qu’est-ce qui a causé cet échec ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Excusez-moi, de quel pays vous parlez Monsieur ?
Jacques : Je parle des Kenyans qui vont venir tout de suite.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Excusez-moi de vous interrompre mais je pense que j’ai répondu : le Kenya envoie des troupes dans le cadre de la MONUSCO et de la Brigade d’intervention.
Jacques : Ah OK, d’accord.
Question 9
Jackson Mutsima/ Journaliste indépendant (Goma) : J’ai suivi Mathias au nom de la MONUSCO se féliciter de la prise en compte dans le programme du gouvernement congolais du programme de désarmement, démobilisation, réintégration communautaire et stabilisation (DDRCS). Je voudrais savoir pratiquement comment la MONUSCO compte s’y prendre pour intervenir aux côtés du gouvernement congolais pour la mise en œuvre de ce processus ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : En matière de DDRCS – c’est l’un des grands défis du Congo, ce n’est évidemment pas le dossier où on a fait les avancées les plus marquantes, pour dire les choses de manière très sincère. Nous avons besoin aujourd’hui d’une ordonnance de la part du gouvernement, justement, d’une direction nationale pour pouvoir soutenir ce programme de DDRCS. Ce dont nous nous félicitons, c’est que le Premier ministre a effectivement pris un engagement personnel pour donner la priorité à ce programme. Donc nous attendons de voir comment cela peut être mis en œuvre.
La MONUSCO a toujours soutenu les programmes de DDR – la dimension communautaire est quelque chose que nous poussons depuis longtemps pour permettre une réintégration des anciens combattants dans leurs communautés d’origine, sans récompense au grade ou par une intégration dans les forces armées, parce qu’à notre sens, ça n’a pas porté ses fruits, ni permis d’atteindre un niveau de stabilité dans le pays.
Et nous avons plusieurs structures – nous avons un Fonds de stabilisation qui a des fonds mobilisés pour soutenir cette approche communautaire, et nous avons également évidemment les Agences des Nations Unies qui vont travailler avec nous. Parce que ce n’est la MONUSCO uniquement qui va faire la réintégration communautaire, c’est évidemment l’Equipe de pays des Nations Unies – UNICEF ou d’autres agences qui vont apporter un soutien aux communautés qui réintègrent des anciens combattants pour que les bénéfices de la paix bénéficient justement à la population qui accueille et qui réabsorbe les anciens combattants.
Question 10
Samuel Sirasi/ La Voix de VUOS (Beni) : Vous avez rappelé que le 3 mai, c’était la Journée mondiale de la liberté de la presse. La déclaration de l’état d’urgence dans les provinces du Nord-Kivu et [Ituri], logiquement la presse va se voir aussi subir certaines restrictions. On veut savoir comment la MONUSCO compte accompagner la presse pendant ce moment pour mettre celle-ci à l’abri d’éventuelles poursuites ? Merci.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Merci pour la question. Je pense qu’il est un peu tôt pour nous de commenter la mise en œuvre particulière de certaines dispositions de l’état de siège – c’est état de siège, pas état d’urgence, je pense que les deux dispositions existent dans la Constitution mais ici, c’est état de siège.
Ce qui est certain, c’est que la MONUSCO est attachée à la liberté d’expression, et évidemment à la liberté des médias, et que nous allons accompagner, comme je l’ai dit, de manière constructive le gouvernement dans la mise en œuvre de cet état de siège, mais nous allons aussi l’accompagner avec une certaine vigilance sur le respect de certains droits fondamentaux qui doivent être préservés, même dans la perspective d’un état de siège.
Question 11
Jackson Mutshima/ Journaliste indépendant (Goma) : Ma question s’adresse à Madame Katya par rapport à ce qui se passe dans les plateaux de Kalehe au Sud-Kivu où il est signalé des tensions fortes entre deux communautés, notamment les Batembo et les Hutus. On y signale également des violences graves, entre autres morts d’hommes, incendies et pillages des maisons et un hôpital à Mubuku et à Katasomo. Il y a des enfants qui ne vont pas à l’école, il y a des familles qui sont dans des conditions vraiment critiques. Est-ce que vous connaissez cette situation et qu’est-ce que vous envisagez pour que l’accalmie puisse régner ?
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Oui, nous connaissons la situation des urgences de Kalehe comme d’autres urgences en Ituri et dans le pays, surtout à l’est. Malheureusement il y a beaucoup d’urgences humanitaires auxquelles faire face, beaucoup de souffrance des populations et d’enfants comme vous le dites.
L’UNICEF, avec d’autres agences des Nations Unies, a des mécanismes d’intervention rapide pour faire face aux urgences, comme on le dit, de première ligne. Mais tout cela est possible pour être déployé quand il y a un accès humanitaire ouvert, et quand les équipes, soit de l’UNICEF ou conjointes avec des partenaires avec lesquels nous travaillons, peuvent se rendre sur place, faire un état des besoins et bien sûr répondre en premier lieu aux besoins pour sauver des vies et ensuite, pour répondre aux besoins en services sociaux de base comme l’éducation, l’eau et l’assainissement, la nutrition et la santé.
C’est comme cela que nous intervenons d’habitude, s’il y a l’accès sécuritaire, bien sûr.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Vous faites bien de rappeler cette situation dans le Sud-Kivu. Il y a effectivement plusieurs milliers de personnes qui ont été déplacées, qui sont allées à Bwegera.
Comme mon collègue de la Force l’a souligné, nous avons déployé une base temporaire à Kahololo au Sud-Kivu justement pour essayer de rétablir la situation sécuritaire dans cette zone. Parce que sans cette situation sécuritaire relativement stabilisée, c’est très difficile pour nos partenaires humanitaires de travailler.
C’est malheureusement une réalité douloureuse qui existe sur les Hauts-Plateaux, qui existe dans le territoire de Kalehe. On essaie de travailler en se déployant de la manière la plus flexible que possible, au plus près des populations qui sont prises au piège de ces milices qui se battent malheureusement souvent sur une base ethnique.
Et il est évident qu’on doit accompagner ce travail sécuritaire d’un travail sérieux de réconciliation entre les communautés. Et c’est un travail dans lequel les communautés elles-mêmes, évidemment, doivent s’engager pour tourner le dos à la violence, afin de permettre aux partenaires, notamment aux partenaires humanitaires et de développement, de se déployer.
Question 12
Saint Germain Ebengo/ Patrienews.net : C’est demain jeudi qu’entrera en vigueur l’état de siège décrété par le chef de l’Etat. Je voudrais savoir son impact sur la résolution en vigueur du Conseil de sécurité qui donne mandat à la MONUSCO.
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Comme je l’ai expliqué, cette disposition est une disposition constitutionnelle qui existe. C’est un outil que le président a décidé d’utiliser pour ramener la stabilité et la sécurité. C’est évidemment une décision souveraine qu’on respecte.
C’est effectivement une décision qui peut avoir des implications pour l’assistance humanitaire, pour certains droits. Encore une fois, on reste engagé, comme l’a fait hier la Représentante spéciale dans sa réunion avec le Président, d’une manière qui est à la fois constructive et vigilante pour soutenir les efforts des forces de sécurité et du gouvernement congolais dans son ensemble.
Nous sommes évidemment déterminés à soutenir autant que possible toutes les solutions qui peuvent être trouvées dans le respect des libertés fondamentales. Mais nous sommes vraiment engagés à faire en sorte que notre soutien permette à l’armée congolaise, à la police, et plus largement à l’Etat congolais de gagner cette bataille contre les groupes armés et les milices. C’est effectivement le fondement de notre présence dans ce pays.
Question 13
Nicolas Ekila/ 24 heures News (Beni) : Ma question s’adresse à la Représentante de l’UNICEF en République démocratique du Congo. On a plus de 20 000 personnes déplacées ici à Beni. Elles ont quitté leurs villages à cause de l’insécurité. Parmi ces déplacés, il y a plusieurs enfants qui ne vont pas à l’école, faute de moyens causés par l’insécurité, la guerre dans la région. Qu’est-ce que l’UNICEF pense [faire] pour aider ces enfants qui restent toujours à la maison ?
Représentante adjointe de l’UNICEF en RDC [Katya Marino] : Merci. Vous parlez de 20 000 déplacés, parmi eux, des enfants. On le disait tout à l’heure : quand il y a l’accès, surtout dans l’éducation, il y a tout un programme qu’on appelle « Education en situation d’urgence ».
Vous aurez vu souvent que quand les écoles sont détruites, on fait des centres d’apprentissage temporaire, soit avec des tentes, soit avec des matériels locaux. On fait des espaces d’enfants pour les protéger. On essaie de travailler dans la communauté environnante pour travailler de façon un peu plus durable, disons, avec les communautés.
Donc, ce sont des programmes qui sont là. Mais je vous reposerai la question à vous : est-ce qu’il y a l’accès sécuritaire, est-ce qu’il y a de l’accès humanitaire aujourd’hui ? Beni, c’est vaste. Je ne sais pas exactement de quelle zone vous parlez. Mais la condition numéro un, comme le disait Mathias tout à l’heure, c’est de s’assurer que les partenaires peuvent se déployer en toute sécurité pour aider la population.
Question 14
Venant Vudisa/RTNC : Mathias, êtes-vous convaincu qu’avec la force de frappe de troupes kenyanes l’insécurité sera totalement éradiquée dans les deux provinces de l’Est ? Etes-vous convaincu, sincèrement ?
Porte-parole de la MONUSCO [Mathias Gillmann] : Ecoutez, je pense que toutes les bonnes volontés sont bienvenues. Au-delà du fait que ces militaires sont Kenyans, Népalais ou d’une autre nationalité, ils apportent une nouvelle compétence, en tout cas une plus grande flexibilité, une plus grande rapidité, une plus grande force de réaction rapide.
Et c’est ce dont nous avons besoin pour pouvoir répondre de manière plus rapide et plus réactive aux multiples menaces qui continuent de toucher la population autour de Beni du fait de la dispersion et du modus operandi des ADF.
Voilà, je vous remercie beaucoup et je vous donne rendez-vous dans deux semaines. Nous rendons la place à l’actualité sur Radio Okapi. Merci.